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L’affaire Fualdès. Le sang et la rumeur

Un crime effroyable

Godefroy Engelmann, Fualdès père, lithographie sur papier vélin, 24,5x17,5 cm, Paris, Ladvocat, 1818.

Source : Collection particulière

Jean Bernardin Fualdès, originaire de Mur-de-Barrez, fait figure de notable à Rodez. Ancien procureur impérial au criminel, bonapartiste, l’homme a occupé diverses activités de magistrature sous la Révolution et l’Empire. Ancien vénérable de la loge de Rodez, il s’est illustré en déjouant en 1814 une tentative d’insurrection ultraroyaliste, entreprise qui lui a valu certaines inimitiés dans la région.

Maison Fualdès rue Balestrière, illustration hors texte (détail) pour Histoire complète du procès de l’assassinat de M. Fualdès, taille-douce, Paris, Eymery, 1818.

Source : Collection particulière

Le soir du 19 mars 1817, Fualdès est de bonne humeur. Plus tôt dans la journée, son ami Bastide Gramont est venu l’aider à négocier avec succès un effet de commerce de 2 000 francs. Ils ont regagné ensemble en fin d’après-midi sa maison, rue de Bonald, chargés chacun d’un sac de pièces d’argent. Fualdès allait enfin régler ses dettes les plus urgentes. Après le dîner du soir, ses amis Sasmayous et Bergounian passent la veillée chez lui comme ils en ont coutume. Un peu avant huit heures, Fualdès les informe qu’il doit sortir et se rend dans son bureau à l’étage pour prendre des affaires. Son domestique lui donne sa canne en jonc et son chapeau. Il remarque qu’il porte quelque chose sous son bras gauche formant une bosse sous sa lévite.

Nicolas Chapuy, Tour de la cathédrale de Rhodez, illustration pour Le Moyen Âge monumental et archéologique, lithographie de Léon Auguste Asselineau, 44,5x28,5 cm, Paris, A. Hauser, vers 1840 (détail).

Source : Bibliothèque de la Société des Lettres de l’Aveyron

À 8h30, Marie Chassan, boulangère, se rend chez M. Vayssettes rue des Hebdomadiers. Elle découvre sur son chemin une canne, celle de Fualdès, dans la rue du Terral, non loin de la rue des Hebdomadiers. En repartant vers les neuf heures, elle trouve un mouchoir blanc quadrillé de bleu dans la même rue. C’est celui d’Anne Benoit, une des locataires de la maison Vergnes où loge au rez-de-chaussée la famille Bancal. Le 20 mars 1817, au petit matin, un corps sans vie est repêché sur les berges de l’Aveyron, près du moulin des Besses, en contrebas de Rodez. L’individu à la jugulaire tranchée n’est pas un inconnu : il s’agit de Bernardin Fualdès.

Maison Bancal, illustration pour Le Sténographe parisien, ou Lettres écrites de Rodez et d’Alby sur le procès des assassins de M. Fualdès, taille-douce sur papier vergé, 21,8 x 13,9 cm, Paris, Pillet, 1818.

Source : Collection particulière

La nouvelle de sa mort gagne rapidement la cité et alimente les rumeurs. Les autorités cherchent à identifier rapidement des coupables. Contre toute attente, l’opinion pointe du doigt une maison de mauvaise réputation comme lieu du crime, la maison Bancal, rue des Hebdomadiers. Deux indices ont été découverts la veille à proximité : la canne de Fualdès et un mouchoir identifié comme le bâillon. L’habitation de deux étages, occupée par plusieurs locataires, offre au rez-de-chaussée le théâtre sordide de l’assassinat. Ses occupants, les Bancal, sont très rapidement suspectés avant d’être arrêtés.

Autour de cette famille, la justice agrège des hommes de main indispensables à l’enlèvement de Fualdès et au transport de son corps. Un petit groupe composé d’un contrebandier, d’un coutelier, d’un portefaix et d’un ancien soldat fait l’affaire ; ils ont bu un verre le soir du drame dans les environs de la rue des Hebdomadiers. Les commanditaires sont cherchés dans l’entourage immédiat du magistrat : un agent de change, Jausion et son beau-frère Bastide-Grammont, débiteur d’une hypothétique créance auprès de la victime. Tous sont accusés d’avoir tendu un guet-apens le soir du 19 mars. Témoin du crime, Joseph Bousquier collabore avec la justice. La rumeur affirme qu’une femme - Mme Manson - aurait été enfermée dans un cabinet adjacent à la cuisine. Son témoignage prend une place considérable dans l’affaire car elle affirme que c’est une autre femme, Rose Pierret, qui lui aurait confié le récit de l’assassinat.