Législation / Textes relatifs aux peines et aux prisons en France / De la Monarchie de Juillet à 1914 /

30 octobre 1841. Règlement général pour les Prisons départementales (2/7)

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§ 2. Du Gardien-chef.




Art. 13. Conditions d’admission. Traitement.
Nul ne pourra être appelé aux fonctions de gardien-chef,
1° S’il ne sait lire, écrire et compter ;
2° S’il n’est âgé au moins de trente ans, et s’il en a plus de quarante, à moins d’autorisation spéciale accordée par arrêté du ministre. Le minimum de son traitement est de six cents francs. Le gardien-chef est toujours logé dans la prison.

Art. 14. Registres.
Le gardien-chef tient les registres d'écrou prescrits par le Code d’instruction criminelle, savoir :
Un registre pour la maison d’arrêt ;
Un pour la maison de justice ;
Un pour la maison de correction.
Tous ces registres sont tenus séparément et conformément aux Instructions ministérielles des 26 août 1831 et 4 janvier 1832.
Les gardiens-chefs tiennent en outre, suivant la prison dont la garde leur est commise, des registres d'écrou séparés, savoir :
Pour les détenus pour dettes envers les particuliers 1 ;
Pour les passagers civils ;
Pour les passagers militaires ;
Pour les condamnés en matière de simple police 2 .

Art. 15. Fonctions.
Indépendamment de la garde des prisonniers et du maintien du bon ordre et de la décence dont il est plus particulièrement chargé, le gardien-chef veille à ce que le service de propreté se fasse exactement dans toutes les parties de la maison.

Art. 16. Effets des prisonniers.
II veille à ce que les effets des prisonniers qui sont mis en magasin soient préalablement lavés, nettoyés, raccommodés, mis en paquets et étiquetés 3 .

Art. 17. Correspondance des détenus.
Dans les prisons où il n’y a pas de directeur, le gardien-chef prend communication des lettres écrites ou reçues par les détenus , à l’exception de celles qu’ils ont à adresser à l’autorité administrative ou à l’autorité judiciaire, aux avocats et avoués chargés de leur défense 4 .

Art. 18. Famille du gardien-chef.
Les enfants du gardien-chef ne doivent jamais entrer dans les cours, préaux, ateliers, infirmeries, dortoirs et autres lieux occupés par les détenus.
Il en est de même de sa femme, hors le cas prévus par l’article 27 du présent Règlement.

Art. 19. Logement.
Dans aucun cas et sous aucun prétexte, le gardien-chef ne peut recevoir les détenus dans son logement 5 .

Art. 20. Détenus à transférer.
Le gardien-chef est tenu, à quelque heure de la nuit ou du jour que ce soit, de remettre, sans le moindre retard, au fondé de pouvoirs de l’entrepreneur du transport cellulaire, les condamnés désignés pour partir les premiers 6 , ainsi que les extraits des jugements et arrêts de condamnation qui les concernent.

Art. 21.
Il est interdit au gardien-chef de remettre à l’entreprise du service des voitures cellulaires aucun condamné malade ou en état d’ivresse. Il ne pourra, non plus , lui remettre aucune femme allaitant son enfant, ou se trouvant dans un état de grossesse apparente, à moins que, dans ce dernier cas, le médecin de la prison n’ait certifié que le transfèrement peut avoir lieu sans danger pour la santé de la femme enceinte.

Art. 22.
Le gardien-chef remet aux chefs d’escorte ou aux fondés de pouvoirs de l’entrepreneur du transport cellulaire un état des vêtements appartenant à chaque prisonnier transféré.

Art. 23. Décès.
En cas de décès d’un détenu, le gardien-chef en fait mention en marge de l’acte d'écrou, conformément à l’article 84 du Code civil. Il en donne avis au maire qui, de son côté, fait constater les effets, papiers, argent, etc., laissés par le défunt.
Il informe, en outre, l’autorité judiciaire du décès de tout prévenu ou accusé.

Art. 24. Responsabilité. Comptabilité.
Dans les prisons où il n’y a pas de directeur, le gardien-chef est responsable des meubles et effets mentionnés dans l’article.
Il peut être chargé, par arrêté du préfet, de la comptabilité des ateliers et de celle de la caisse des dépôts.


§ 3. Gardiens ordinaires et Portiers.




Art. 25. Conditions d’admission. Traitement.
Les gardiens ordinaires et portiers ne peuvent être nommés avant vingt-cinq ans et après quarante, à moins d’autorisation spéciale du ministre : ils devront savoir lire et écrire.
Leur traitement ne peut être au-dessous de quatre cents francs.

Art. 26. Subordination. Responsabilité. Dégâts.
Les gardiens sont placés immédiatement sous les ordres du gardien-chef, et doivent se conformer exactement à tout ce qu’il leur prescrit.
Ils sont responsables des dégradations aux bâtiments et autres dégâts de toute sorte commis par les détenus, lorsqu’ils ont eu connaissance de ces faits et qu’ils ne les ont pas signalés sur-le-champ au gardien-chef.


§ 4. Surveillantes.




Art. 27. Surveillantes. Leur traitement.
Les quartiers habités par les femmes ne peuvent être surveillés que par des personnes de leur sexe, lesquelles y sont chargées des fonctions que les gardiens remplissent dans les quartiers des hommes.
Dans les prisons où, en raison du petit nombre habituel des femmes détenues, il ne serait pas nécessaire d'établir des surveillantes spéciales, la femme ou toute autre parente du gardien-chef, dûment autorisée à cet effet par le préfet, pourra être chargée d’exercer la surveillance dans le quartier des femmes. Le traitement des surveillantes ne peut être au-dessous de deux cent cinquante francs.

Art. 28. Interdiction relative au quartier des femmes.
Les surveillantes reçoivent, comme les gardiens, les ordres du gardien-chef qui, seul de tous les préposés du service de sûreté, pourra entrer dans le quartier des femmes, à moins de circonstances extraordinaires dont il sera rendu compte an maire.

Art. 29. Sœurs religieuses.
Dans les prisons où il n’y a pas de sœurs religieuses, les surveillantes sont chargées, en totalité ou en partie, des fonctions attribuées aux sœurs (voir Règlement du service des sœurs du 22 mai 1841).

Art. 30. Attributions des soeurs.
Les attributions des sœurs religieuses sont déterminées par un arrêté du préfet, approuvé par le ministre.


§ 5. Du Commissionnaire et du Barbier.




Art. 31. Commissionnaire à défaut de fournisseur. Heures et mode des commissions.
Dans les prisons où il n’y a pas de fournisseur chargé de procurer aux détenus les aliments supplémentaires ou autres articles accessoires autorisés par le présent Règlement, les commissions des détenus sont faites par un commissionnaire désigné par le préfet.
Tous les jours, à l’heure fixée par le Règlement particulier de la prison, le commissionnaire reçoit du gardien-chef la note des commissions à faire.
Au retour du commissionnaire, le gardien-chef remet ou fait remettre aux détenus, par les gardiens sous ses ordres, les objets qu’il aura reconnus conformes à l’autorisation accordée.

Art. 32. Prohibitions imposées au commissionnaire.
II est défendu au commissionnaire d’entrer dans l’intérieur de la prison et de communiquer directement avec les détenus.
Il lui est également défendu, sous peine de destitution, de faire aucun bénéfice sur le prix de vente des objets qu’il aura achetés pour les détenus.

Art. 33. Barbier.
Un ou plusieurs barbiers, salariés par l’administration, sont attachés à chaque prison, où ils se rendent aux jours et heures fixés par le Règlement.


Notes

1.

Ce registre n’est qu’un registre d’ordre et d’administration, affranchi du timbre, comme les autres par l’article 16 de la loi du 13 brumaire an VII. Il diffère complètement et ne dispense pas du registre judiciaire spécial, prescrit par l’article 790 du Code civil, que vise et parafe, à ce titre, le président du tribunal de première instance, et qui est soumis, comme tel, au timbre.

2.

Outre la tenue de ces registres, l’envoi d’un rapport quotidien au maire peut être exigé du gardien-chef par le Règlement particulier de la maison. (Instruction du 27 mai 1842) Mais ce rapport ne peut être exigé par l’autorité judiciaire. Pour les autres écritures que le gardien-chef a à tenir, voir les art. 11, 16, 22, 23, 34, 31, 38, 85, 103 et 122 du présent Règlement.

3.

Les gardiens-chefs sont tenus d’inscrire sur un registre les effets dont se trouvent nantis les détenus au moment de leur arrivée, et de donner aux gendarmes un état détaillé des vêtements de chaque détenu transféré (voir l’Instruction du 8 juillet 1829 et l’article 22 du présent Règlement)

4.

Si l’on peut s’en rapporter au gardien-chef lorsqu’il juge qu’il n’y a aucun inconvénient à laisser passer une lettre, il n’en est pas de même lorsqu’il croit devoir la retenir. Dans ce cas, le Règlement particulier peut ordonner que les lettres retenues seront par lui remises au maire ou au commissaire de service (Instruction du 27 mai 1842 et art. 4 du projet de Règlement du 28 juin 1843)

5.

Cette prohibition comprend les détenus pour dettes comme les autres (Art. 41)

6.

Voir les instructions des 15 avril 1833 et 15 juillet 1838. Le gardien ne doit retarder, par faveur, le départ d’aucun condamné à plus d’un an qui n’est pas autorisé à subir sa peine dans la prison départementale. (Instruction du 10 février 1841 et, ci-après, art. 41.)