9. Les graffitis du camp de la transportation de Saint-Laurent-du-Maroni (Guyane)

Plan du chapitre

Graffitis

Classé au titre des monuments historiques en 1995, le camp de la transportation de Saint-Laurent-du-Maroni était un pénitencier qui accueillait des forçats (transportés) en Guyane au XXe siècle.

Ce monument a connu une importante campagne de restauration et dispose désormais d'un Centre de l'interprétation de l'architecture et du patrimoine inauguré en 2014. Il se visite et dispose, entre autres, d'une exposition permanente dédiée au bagne de Guyane. Le visiteur peut également y apprécier de magnifiques décors peints par des forçats ou par un ancien surveillant, Emile Demaret, restaurés par Isabelle Stetten et son équipe dans les cases n°2 et n°3 du camp ainsi que le bâtiment de la cuisine et de la salle anthropométrique (où se situe le parcours d'exposition permanent).

Isabelle Stetten est conservatrice-restauratrice de peinture. Accompagnée d'une équipe de 15 conservateurs-restaurateurs, elle a réalisé en 2014 un important chantier de restauration au camp de la transportation qui a porté sur les cases n°2 et n°3 ainsi que sur le bâtiment qui contenait la cuisine et l'atelier anthropométrique. 

Isabelle Stetten était déjà très familiarisée avec les fresques effectuées par des bagnards puisqu'elle fut également en charge de la restauration de la chapelle de l'Île Royale. Ce monument historique est situé sur l'archipel des Îles du Salut, en Guyane, et son décor intérieur a été réalisé par un ancien forçat, Francis Lagrange. Il est visible sur Criminocorpus, en visitant l'exposition réalisée par Lucile Quézédé (Association AGAMIS) Le bagne des Îles du Salut (Royale, Saint-Joseph, Diable).

Edition en ligne : Jean-Lucien Sanchez

Cuisine et salle anthropométrique

Le décor de la salle anthropométrique, composé de trois panneaux peints à l’huile en 1950 par Emile Demaret, alors surveillant,  est accompagné d’une frise décorative qui court sur trois des quatre murs, en hauteur.

Selon le témoignage (avril 2014) de l’auteur Emile Demaret : « En ce qui concerne la peinture murale effectuée dans l'ancienne anthropométrie il s'agit, pour le panneau de gauche, en faisant face au mur, d'une copie du tableau "le moulin à eau" de Mendeirt Hobbema, seul modèle que je possédais à l'époque pour suggérer un paysage de la France. Le panneau à droite est une composition personnelle relative à un paysage colonial inventé. Sachant que la fin du bagne était proche en 1950 et que ce travail n'était donc pas destiné à durer, je n'ai pris aucune précaution pour préparer le mur et j'ai peint directement sur le plâtre avec des peintures industrielles préparées pour moi par l'ingénieur chargé des travaux de l'administration. »

Selon la fille d’Emile Demaret, il aurait réalisé cette fresque en mai 1950, dès son arrivée, en deux dimanches après-midi.

Extrait de l’entretien « Surveillant militaire, j’ai vu la fin du bagne ». Entretien avec Émile Demaret, ancien surveillant militaire des bagnes coloniaux. Entretien réalisé et retranscrit par Philippe Poisson et Marc Renneville (Criminocorpus, mars-juin 2006) : « Ce n’est qu’à mon deuxième séjour (mars 1950-mai 1952) que j’ai trouvé les relations moins tendues, certains gendarmes venant prendre leurs repas à notre mess au cours des quelques mois de son fonctionnement dans les locaux de l’ancienne anthropométrie qu’en tant qu’artiste j’avais été chargé de décorer d’une fresque représentant deux paysages, l’un tropical, l’autre métropolitain entourant l’écusson représentatif de notre corps, avec sur le pourtour de la salle un feston des décorations auxquelles nous pouvions prétendre : médailles militaire, coloniale, d’honneur pénitentiaire ainsi que Légion d’honneur. »