« La peine du carcan s’exécute ainsi. Celui qui y est condamné, est conduit à pied, les deux mains liées en devant, & attaché au derrière de la charrette de l’Exécuteur, jusqu’au poteau planté dans la place publique, auquel est attachée une chaîne, au bout de laquelle pend un collier de fer de trois doigts de large, ayant une charnière pour l’ouvrir. L’Exécuteur fait entrer le cou nud du Patient dans ce collier, qu’il ferme ensuite avec un cadenat : celui-ci a quelquefois un écriteau devant et derrière, où est marquée la qualité de son Crime. Il reste en cet état plus ou moins d’heure, & y est remis deux ou trois jours, aux termes de son Arrêt » (Muyart de Vouglans, Les lois criminelles de France, 1780).
« Il étoit encore vêtu de l’habit du deuil de son épouse, morte il y avoit environ un an, portoit à ses pieds des escarpins tout neufs, étoit frisé et poudré à blanc, et avoit d’ailleurs une contenance si modeste et si imposante, que les personnes qui s’étoient trouvées à portée de le contem- pler de plus près, disoient qu’il falloit qu’il fût ou le chrétien le plus parfait, ou le plus grand de tous les hypocrites. En allant à la Grêve, attaché au cul de la charrette du bourreau, l’écriteau qu’il portoit sur la poitrine s’étant dérangé, on remarque qu’il le redressoit lui-même, sans doute, pour qu’on pût le lire plus facilement. Pendant les deux heures qu’il demeure exposé au carcan dans la place de Grêve, on observe qu’une multitude prodigieuse de personnes de distinction dans leurs équipages se succédoient les unes aux autres, attirées probablement par la curiosité de voir un personnage si étonnant; il y avoit aussi un très grand nombre de piétons. Le temps de l’humiliation dudit Billiard étant achevé on le détache du poteau, et on le conduit à l’entrée de la rue du Mouton, où il monte dans un carrosse de place, accompagné de deux exemts de robbe courte, s’il n’avoit pas été bien escorté en gagnant ce carrosse, on pensoit qu’il eût été difficile de le garantir des mauvais traitements de la populace qui crioit haro contre lui. On le menne à la barrière du Trône, d’où l’on assuroit qu’il avoit été conduit par ordre du Roi chez les religieux de Charenton ». Siméon Prosper Hardy, Journal, 18 février 1772.