L’organisation de la justice est profondément modifiée par deux réformes, en 1958, avec la suppression des justices de paix et la création des tribunaux d’instance et de grande instance, puis en 2009-2010, avec une nouvelle concentration des sièges de juridictions. Cette évolution s’est accompagnée d’une politique d’aménagement et de reconstruction progressive des palais de justice.
4. Après 1958
Plan du chapitre
Quatrième partie. Après 1958
La carte judiciaire : une réflexion permanente
A partir de la fin du 19e siècle, une centaine de projets de réforme du découpage du territoire judiciaire ont été élaborés, sans résultat durable.
La grande réforme a lieu en 1958. L’organisation de la justice mise en place repose sur deux types de juridictions :
- le tribunal d’instance, qui traite la plupart des petits litiges de la vie quotidienne (accidents de la circulation, dettes impayées, travaux mal exécutés…) et la tutelle des mineurs et des majeurs.
- le tribunal de grande instance, qui traite les affaires civiles plus importantes, comme les divorces ou les successions ; c’est là aussi que siègent le tribunal de police, qui juge les contraventions, le tribunal correctionnel, qui juge les délits et la cour d’assises, qui juge les crimes.
Après 1958, les tribunaux d’instance sont à Belley, Bourg-en-Bresse, Nantua et Trévoux et les tribunaux de grande instance à Belley et Bourg-en-Bresse. L’ensemble des juridictions dépend toujours de la cour d’appel de Lyon, où sont jugées en appel toutes les affaires des tribunaux de grande instance, du tribunal de commerce et des conseils de prudhommes.
Cette organisation perdure pendant 50 ans. En 2007, une nouvelle réforme est engagée pour moderniser l’équipement de la justice et réduire ses coûts de fonctionnement. Sur la base du nombre d’affaires civiles et pénales traitées dans l’année, des distances de trajet, de l’implantation des prisons et des perspectives démographiques, 401 juridictions sont supprimées en 2009-2010. En 2009, le tribunal de grande instance de Belley est parmi les premiers tribunaux supprimés : toute l’activité pénale, ainsi que les litiges civils importants sont concentrés à Bourg-en-Bresse.
La fin du tribunal de grande instance de Belley
Parmi les 401 suppressions de juridictions réalisées en 2009-2010, 8 ont particulièrement été remises en cause, dont celle du TGI de Belley. Parmi les arguments, l’éloignement de Bourg de toute la partie Ouest du ressort du tribunal, à plus de 45 mn de trajet. Mais le nombre d’affaires traitées annuellement, inférieur à 1550 affaires civiles et 2500 affaires pénales, a été un argument prépondérant.
Les palais de justice du 19e siècle
Des travaux ont été effectués dans le palais de justice de Belley par le ministère de la Justice, notamment pour aménager le Service d’Accueil Unique du Justiciable (SAUJ), qui permet aux citoyens d’obtenir des informations et des formulaires sur des questions générales ou une procédure en particulier, depuis n’importe quel tribunal.
La fin des justices de paix
La salle d’audience de la justice de paix a été transformée en salle de réunion du conseil municipal et le bureau du greffier accueille des services sociaux.
Le défi de la justice de proximité
En 1958, les 37 justices de paix existant dans les cantons de l’Ain sont supprimées : le premier niveau de juridiction est reporté dans chacun des tribunaux d’instance de Belley, Bourg, Nantua et Trévoux. A cette époque, la réforme est bien acceptée : le volume d’affaires traitées par les juges de paix était en baisse constante et la fonction, très dévalorisée, n’attirait plus beaucoup de candidats. Les locaux des justices de paix sont récupérés par les communes, pour y installer des bureaux ou d’autres activités.
Cependant, rapidement, le besoin d’une justice plus proche des citoyens et l’utilité de la conciliation pour désengorger les tribunaux d’instance font naître des réflexions en faveur du rétablissement d’un premier niveau de juridiction. Mais les « juges de proximité », recrutés dans la société civile, compétents pour les litiges de la vie quotidienne entre deux particuliers ou entre un professionnel et un particulier, n’existeront qu’entre 2003 et 2016.
Aujourd’hui, d’autres organismes assurent une mission de démocratisation et d’ouverture de la justice, complémentaire de celles des juridictions.
- la maison de la justice et du droit
- le conseil départemental de l’accès au droit
Installés dans des bâtiments banalisés, proches des populations, ils animent des points d’accès au droit répartis sur tout le territoire du département : tous les habitants du département disposent d’un point d’accès au droit à moins de 20 km de chez eux. Ils favorisent également les modes amiables de règlement des conflits et mènent des actions pédagogiques pour une meilleure connaissance du fonctionnement de la justice. La majorité des demandes des justiciables qui fréquentent les permanences du Conseil départemental d’accès au droit concerne le droit de la famille (divorces, tutelles, curatelles), le droit du travail (respect et rupture du contrat de travail) et, de plus en plus, le droit de la consommation (litiges entre client et artisan, avec les sociétés de téléphonie…).
Enfin, l’usage des technologies de l’information et de la communication va permettre de développer la communication entre les juridictions et la dématérialisation des dossiers : un justiciable pourra à l’avenir se présenter dans n’importe quelle juridiction pour obtenir des renseignements sur une procédure en cours. Cette évolution va bouleverser profondément la notion de carte judiciaire.
Le palais de justice de Nantua : en 2010, pour renforcer le rôle du tribunal d’instance et garantir la pérennité d’un pôle judiciaire dans leur arrondissement, les communautés de communes du secteur ont financé la réfection du tribunal : salle d’audience, accueil et création de bureaux pour faciliter les actions d’accès au droit.
Des palais de justice ouverts sur la cité
Après 1958, dans les palais de justice de Belley, Bourg, Nantua et Trévoux, il faut traiter un plus grand nombre d’affaires (celles qui étaient jugées auparavant dans les justices de paix), loger un plus grand nombre de personnel (la population du département augmente, le nombre d’affaires civiles et pénales aussi…). On adapte tant bien que mal les vieux palais de justice du 19e siècle, par de nouveaux aménagements, des agrandissements ou l’ouverture d’annexes.
L’environnement des palais de justice se transforme, notamment par la disparition des prisons qui les flanquaient depuis deux siècles : la prison de Belley ferme en 1952 et celle de Nantua en 1953.
Peu à peu, en France, les juridictions s’installent dans des bâtiments entièrement neufs, adaptés au fonctionnement contemporain de la justice et qui tentent de concilier la solennité de la justice avec l’image d’une institution transparente et bienveillante. En 1983, tout le patrimoine immobilier de la justice est centralisé : les Conseils généraux ne sont plus propriétaires ni constructeurs des palais de justice. Les programmes de construction sont pilotés depuis le ministère de la Justice.
Dans l’Ain, où les locaux judiciaires étaient très anciens et peu adaptés au fonctionnement actuel de la justice, deux bâtiments sont nouvellement construits, à Bourg-en-Bresse :
- le centre pénitentiaire de 690 places, en périphérie de la ville, inauguré en 2010
- le nouveau palais de justice, véritable cité judiciaire, qui regroupe, au cœur de la ville, toutes les juridictions qui siègent dans la ville chef-lieu du département : tribunal d’instance, tribunal de grande instance, tribunal de commerce et conseil des prud’hommes.