1. Le monde du bagne

Plan du chapitre

Le bagne de Rochefort

Le 5 janvier 1767, un arrêté du Conseil d’État du Roi proclame la création d’une chiourme à Rochefort. Son but est le même que les bagnes de Brest, Toulon et Marseille : il s’agit de donner de la main-d’œuvre pour servir aux travaux des arsenaux. Ouvert la même année, le bagne de Rochefort est cependant plus petit que les autres.

Avant le bagne

La condamnation au bagne entraîne, jusqu’en 1848, une disposition accessoire qui précède le transfert du condamné à Rochefort : c’est l’exposition publique.

Le bagne, miroir de la société ?

Le bagne de Rochefort reçoit des hommes valides reconnus aptes à travailler aux travaux du port, âgés de 21 à 40 ans.

Le transport des forçats

Après avoir été exposés, les forçats sont ferrés aux chevilles et au cou pour rejoindre la « chaîne » qui les regroupe pour les mener à pied jusqu’à leur destination. La route est pour beaucoup épuisante et il n’est pas rare que quelques-uns décèdent. Ces chaînes comptent entre 40 et 150 hommes marchant dans les campagnes, accompagnés de leurs gardes. La chaîne est également utilisée pour transférer des forçats d’un bagne à un autre. Cette longue traversée des villes et villages, avec des temps d’arrêt pour se reposer dans les champs, marque aussi à la fois les esprits des gens libres et des forçats. Les premiers, répugnant à subir une telle humiliation, se voient inciter à rester dans « le droit chemin » ; tandis que les condamnés prennent conscience, au cours de ce long cheminement, de leur nouveau statut.

L'arrivée au bagne

Une fois arrivé au bagne après un trajet long et pénible, le forçat est accueilli par l’autorité civile, le Conseil de Santé de la Marine et le personnel du bagne.
Le Conseil de Santé de la Marine visite les forçats arrivant au bagne pour évaluer leur état de santé. Le premier médecin et le premier chirurgien en chef dressent l’état sanitaire et physique de chaque condamné. Certains forçats, épuisés par la chaîne, sont adressés à l’hôpital maritime ou l’infirmerie du bagne. Si le forçat est reconnu inapte au travail, les médecins peuvent préconiser une activité moins pénible ou un transfert vers le bagne de Brest. Il n’est pas rare que certains forçats tentent à cette étape de simuler un état de santé dégradé pour obtenir un aménagement ou un transfert.

La religion

Le bagne entretient un lien très étroit avec la religion, hérité pour partie du temps des galères. Sous Louis XIII, Saint Vincent de Paul se voit en effet attribuer la charge d’entendre, de consoler et de voir les galériens à bord des navires. Il deviendra, ensuite, saint patron des prisonniers

La police secrète du bagne

Du bagne de Rochefort, il ne reste que quelques traces iconographiques et des plans. Zaccone, dans son ouvrage, en propose cette gravure. Le bâtiment est clair, épuré, imposant. À gauche, une immense entrée sombre laisse sortir des hommes, sorte de sas de transition entre les quartiers personnels des forçats et l'extérieur, qui est lumineux. Ces hommes en file indienne, ce sont des forçats. Sur leurs casaques, on peut y voir les lettres T.F. pour Travaux Forcés ; et ils portent un bonnet. Ils sont tranquilles, discutent entre eux. Ils sont majoritairement dans la lumière et ont tous un visage bien défini : ils sont rendus humains et nous regardent... A contrario les garde-chiourmes qui encadrent la file de forçats sont en uniforme, armés de fusils et portent l'épée. Ils regardent partout : les recoins, les forçats, le lecteur. Impossible d'échapper à leur surveillance. Cependant, leurs visages ne sont pas clairs, peu détaillés. Les garde-chiourmes sont majoritairement placés dans les zones d'ombre de la gravure. Ils sont des ombres qui guettent les forçats qui tenteraient de s'enfuir ou de se rebeller.

Les gardes-chiourmes

Ayant pour fonction de surveiller les condamnés au bagne, la Compagnie des garde-chiourmes, créée en 1803, ne cesse de se moderniser, pour notamment discipliner et valoriser la profession auprès des civils et des militaires en quête d’une nouvelle carrière. Chaque garde-chiourme est armé de fusils et de sabres de 1re classe, modèle d’infanterie, et porte un uniforme bleu marine, comme le montre l'aquarelle ci-contre extraite du Journal de Clemens.

Les garde-chiourmes peuvent être recrutés parmi tous les corps de métier, cependant, les jeunes militaires sont prioritaires en raison de leur formation à la rigueur et au commandement de l’armée.

Le bagne et la ville de Rochefort

L’administration du bagne passe régulièrement des marchés publics avec les commerçants de la ville – chaussures des forçats – mais les habitants et les commerçants ne peuvent, sous aucun prétexte, entretenir de relations directes avec les condamnés sous peine d’amende.

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