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La Petite-Roquette

La prison de la Petite-Roquette est construite sous le règne de Charles X (1824-1830) (Seconde Restauration) sur une partie de l'ancien terrain du couvent des Hospitalières de la Roquette – à proximité du cimetière du Père-Lachaise – à partir de 1825. Initialement destinée à recevoir les femmes condamnées et détenues administrativement, elle est inaugurée le 28 novembre 1825, mais demeure inoccupée jusqu'en 1830. Supervisée par l’architecte Louis-Hippolyte Lebas (1782-1867), son édification s’étale de 1826 à 1836. Les plans conçus par Lebas suivent le système pénitentiaire panoptique préconisé par Tocqueville et Beaumont pour réformer les prisons françaises : le régime dit « philadelphien », fondé sur l'isolement cellulaire individuel strict. C’est le 11 septembre 1836 que la maison d’éducation correctionnelle de la Petite-Roquette, premier établissement pénitentiaire spécifique pour les mineurs, est inaugurée. Les mineurs y sont transférés depuis la vieille prison des « Madelonettes » ou « Maison des jeunes détenus ». Le régime auburnien y est appliqué dès l'ouverture de la maison : de 1836 à 1837, les détenus ne sont séparés que durant la nuit et ils travaillent et prennent leur repas en commun pendant la journée sous la condition du silence absolu. Puis rapidement, le régime philadelphien est adopté, suivant l'arrêté-règlement du 27 février 1838 qui prescrit « le travail et l'isolement » jour et nuit, sans aucune communication entre détenus. A cet effet, ateliers et réfectoires sont transformés en cellules entre 1838 et 1840. La maison d’éducation correctionnelle de la Petite-Roquette est une prison d’environ 500 cellules individuelles. Construite en étoile sur plan panoptique hexagonal symétrique. Six quartiers sont séparés par six couloirs qui convergent vers une tour centrale surmontée d’une chapelle. L’enceinte compte six tourelles en saillie. Les cellules individuelles sont pourvues d’une grande fenêtre sans barreaux et comprennent chacune une table, une chaise, et un lit-hamac. En théorie, la Petite-Roquette reçoit quatre catégories d'enfants : les détenus préventivement, les détenus en vertu de l'article 66 du Code pénal, les détenus en vertu de l'article 67, et les détenus par voie de correction paternelle. Malgré cette population hétérogène, le même régime extrêmement sévère est appliqué pour tous les détenus, pour lesquels la durée de séjour varie en fonction de la catégorie. Le 22 juin 1865, Eugénie de Montijo, épouse de Napoléon III et impératrice des Français du 29 janvier 1853 au 4 septembre 1870, visite la Petite-Roquette et s’enquiert de la situation de chaque enfant détenu. Une mutinerie éclate après son passage. Le 7 août 1865, le système d’isolement individuel total est abandonné ; les enfants sont dispersés dans les colonies pénitentiaires agricoles.

La Petite-Roquette devient un lieu de détention pour les prévenus des tribunaux de la Seine, enfants et adultes, tout en conservant son quartier de correction paternelle. Puis, suite à la fermeture de la prison Saint-Lazare en juillet 1932, elle accueille les femmes prévenues de Paris. En dépit de son état de vétusté – les cellules ne possèdent ni chauffage, ni eau, ni toilettes –, la Petite-Roquette reste une prison pour femmes jusqu’en 1973, année de leur transfert à la toute nouvelle maison des femmes de Fleury-Mérogis dans l’Essonne. La Petite-Roquette est désaffectée en mars 1973. Un « Comité contre la démolition de la prison de la Petite-Roquette » lance une pétition et organise des visites pour sensibiliser le public à l’importance de sa sauvegarde. Pourtant dès mars 1974, le conseil municipal de la Ville de Paris entreprend le projet de démolition de la prison, sur l’emplacement de laquelle le square de la Roquette est construit en 1977.