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Auberive - Colonie pénitentiaire agricole

L'abbaye cistercienne d'Auberive – Alba Ripa – est fondée en 1135 par douze moines sur ordre de Saint-Bernard, abbé de Clairvaux. Située en Haute-Marne à 27 km de Langres, elle est riche de 5000 hectares de forêt. C’est principalement au cours du XIIIe siècle que son activité prospère grâce à ses quatorze moulins, ses treize étangs, ses vignes, ainsi qu’une mine de fer et une mine de sel. Elle est entièrement reconstruite au XVIIIe siècle par les architectes Claude Louis Daviler et François Buron. Les huit derniers moines de l’abbaye partent à la fin de 1790, puis le domaine est inventorié et vendu comme bien national – à l'exception des 5000 ha de forêts qui deviennent domaniales.

Commence alors l’histoire contemporaine du site d’Auberive. Abel Caroillon de Vandeuil, gendre de Diderot, achète les bâtiments pour les aménager en filature de coton en 1797. Puis, en 1807, il transforme l'abbaye en lieu de villégiature pour sa femme et lui-même. À leurs morts, en 1825, leur fils vend l'ensemble au maître de forges Bordet qui démontera l'église abbatiale pour construire un haut-fourneau avec les pierres. Puis, le 18 octobre 1856, Bordet vend l'abbaye à l'administration pénitentiaire qui en fait une maison centrale pour femmes afin de désengorger la maison centrale installée à l'abbaye de Clairvaux depuis le début du XIXe siècle. L'architecte Dormoy aménage les bâtiments pour pouvoir accueillir 600 prisonnières. La communarde Louise Michel (1830-1905) y est transférée avec vingt autres femmes de la prison encombrée de Versailles le 24 décembre 1871 – elle y attendra 20 mois jusqu'à sa déportation en Nouvelle-Calédonie le 24 août 1873.

Entre 1885 et 1891, l'abbaye d’Auberive devient une colonie industrielle pour délinquantes mineures de 7 à 16 ans puis, de 1894 à 1924, une colonie agricole pour jeunes garçons délinquants, colonies instaurées dans le cadre de la loi du 5 août 1850 sur « l'éducation et le patronage des jeunes détenus » qui prévoit de sortir les enfants des prisons classiques pour les former à des métiers d'ouvriers. En réalité, les conditions d'enfermement sont identiques à celles des prisonniers adultes. L’emploi du temps de la journée se partage entre travaux agricoles et enseignements élémentaires. Les garçons les plus jeunes travaillent les terres de la ferme de la Cude louées par la colonie pénitentiaire, les plus âgés sont placés comme garçons de ferme. Ce sont entre 100 et 200 enfants en moyenne qui seront placés à l'abbaye d'Auberive pendant les 30 années d’activité de la colonie. Ils reçoivent une formation agricole et une instruction sommaire. Les pupilles forment une population hétérogène ; on y compte de véritables délinquants juvéniles, mais aussi des enfants souffrant de handicap mental. À l’instar des autres colonies pénitentiaires de l’hexagone, la colonie agricole d’Auberive se révèle un véritable échec. Elle ferme ses portes en 1924. L’abbaye est remise en vente en 1926, Monseigneur Vladimir Ghika y fonde la communauté des Frères et Sœurs de Saint-Jean de 1927 à 1930, année où il revend l'abbaye à la communauté bénédictine Sainte-Marie de Paris. Celle-ci la cède en 1954 à la communauté cistercienne Sainte-Marie de Pont-Colbert de Versailles. Classée Monument historique en 1956 l'abbaye est rachetée en 1960 par la société Solvay de Tavaux qui en fait une colonie de vacances utilisée par son comité d'entreprise. Le site est racheté en 2004 par la famille Volot qui le transforme en centre d'art contemporain – inauguré en 2006.