Belle-Île-en-Mer - Colonie pénitentiaire agricole et maritime
La colonie pénitentiaire agricole et maritime de Belle-Île-en-Mer est un établissement public créé par décision ministérielle du 29 mai 1880 dans les bâtiments de l’ancienne prison de Haute-Boulogne jouxtant la citadelle. Construits en 1848 par le Génie militaire, ces bâtiments serviront de dépôt d’insurgés politiques en 1848 et 1871, avant de devenir une maison centrale de force et de correction. Fondée en application de la loi du 5 août 1850 sur le patronage et l’éducation des jeunes détenus, la colonie pénitentiaire agricole et maritime de Belle-Île-en-Mer reçoit des détenus acquittés âgés de 12 à 21 ans, ayant agi sans discernement mais non remis à leurs parents, ainsi que des jeunes condamnés à un emprisonnement de six mois à deux ans. Jusqu’à la date du décret du 29 mai 1880, les mineurs détenus du Morbihan étaient confiés à des congrégations religieuses : les sœurs Marie-Joseph du Dorat à Sainte-Anne-d’Auray pour les jeunes filles et les Pères du Saint-Esprit et de l’immaculé Cœur de Marie à Langonnet pour les jeunes garçons. En 1887, l’Administration pénitentiaire loue une partie du domaine de Bruté-Souverain à 3 kilomètres de Haute-Boulogne pour y installer une section agricole qui deviendra une ferme-école pour les colons. La totalité du domaine (117 hectares) est acquise par le ministère de la Justice en 1902. Entre 1906 et 1910, l’administration pénitentiaire y fait construire une annexe de deux bâtiments en pierre qui peuvent recevoir environ 320 colons.
Le site de Haute-Boulogne regroupe l’administration, les réfectoires, une buanderie, quatre ateliers dédiés aux activités maritimes, un atelier de sardinerie, une chapelle, un quartier disciplinaire de vingt cellules et les dortoirs qui seront transformés en cellules grillagées à la fin du siècle. Les colons, apprentis matelots, font leurs premiers exercices de marine sur un petit trois mâts dans la cour de la colonie, embarquent sur un 25 mètres, « le Sirena », pour les exercices de pêche, et s’entraînent sur des canots à rames et à voiles.
La ferme-école du site de Bruté forme les colons à l’agriculture pour pallier le manque de main-d’œuvre agricole dont souffre l’économie belliloise – la très grande majorité des hommes de Belle-Île sont marins.
Dans les années 1890, l’avocat Henri Rollet (1860-1934), contributeur à l’élaboration de la loi du 24 juillet 1889 sur la protection des enfants maltraités ou moralement abandonnés et premier juge des enfants en 1914, visite la colonie de Belle-Île qu’il qualifie de « véritable structure pénitentiaire ». Le régime disciplinaire y est effectivement très dur. Deux événements significatifs marqueront d’ailleurs l’institution : la pendaison d’un surveillant de marine à la drisse d’un mât par des colons en 1908, ainsi que la révolte et la poursuite de 56 colons fugitifs en août 1934 qui déclencheront le mouvement des campagnes de presse contre les bagnes d’enfants initié par le journaliste-reporter Alexis Danan.
Suite à l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, la colonie de Belle-Île devient un internat public de l’Éducation surveillée (IPES) en 1947. L’institution décline progressivement entre les années 50 et 70, décennie qui voit évoluer l’éducation surveillée vers des structures polyvalentes et moins isolées des familles. L’IPES de Belle-Île ferme ses portes en 1977.