L'impact de la Commune de Paris
« Missel des communards », 1871
Paris, archives de la préfecture de police, n.c.
La répression de la Commune de Paris marque un tournant dans l’usage policier de la photographie. Les services de la préfecture de police font appel au photographe Appert pour réaliser dans les prisons de Versailles les portraits des communards arrêtés. Dans les années qui suivent, sans être systématique, la pratique se développe à la préfecture de police, dans les polices urbaines de quelques grandes villes, des greffes des tribunaux, quelques maisons d’arrêt ou prisons militaires. Les portraits commencent à nourrir les dossiers individuels des condamnés, les dossiers de procédure et les premières fiches. Ils sont le plus souvent de qualité médiocre et associés à des feuillets signalétiques pré-imprimés.
« Missel des communards », 1871
Paris, archives de la préfecture de police, n.c.
Dans ce petit album, du même modèle que ceux que l’on trouve alors dans les intérieurs bourgeois, les portraits figurant dans les fenêtres découpées dans les planches sont recouverts de courtes notices signalétiques, ce qui en rend la consultation malaisée. Confectionné en 1871 et appelé « missel » par les services de la préfecture de police, il témoigne des tâtonnement de la police pour associer, sur un même support, l’écrit à l’image.
« Missel des communards », 1871
Paris, archives de la préfecture de police, n.c.
Portraits judiciaires de suspects réalisés à l’été-automne 1871 dans les prisons versaillaises par Ernest Eugène Appert
Paris, archives de la préfecture de police, série Iconographie, carton 25
La répression de la Commune de Paris marque un tournant avec, pour la première fois, le recours à un photographe, Ernest Appert, pour réaliser dans les prisons de Versailles les portraits des Communards. Ces portraits sont joints aux dossiers d’instruction ; ceux des personnalités les plus célèbres sont même commercialisés pour satisfaire la curiosité du public. Ici, la photographie n’est pas seulement considérée comme une marque humiliante ; elle accompagne la revendication publique d’un engagement politique.
Portraits judiciaires de suspects réalisés à l’été-automne 1871 dans les prisons versaillaises par Ernest Eugène Appert
Paris, archive de la préfecture de police, série Iconographie, carton 25
Lettre du ministre de la Guerre au ministre de l’Intérieur concernant la photographie de certaines catégories de condamnés, 29 février 1872
Paris, Archives nationales, F7 12708
À la suite des bouleversements de la Commune insurrectionnelle de Paris, l’administration française se rallie progressivement aux nouvelles possibilités de surveillance et de contrôle offertes par la photographie. Dans cette lettre, le ministre de la Guerre invite celui de l’Intérieur à étendre l’usage du fichage photographique, déjà adopté pour les condamnés au sein de la marine et de l’armée de terre. « Il pourrait y avoir avantage à appliquer une mesure semblable aux individus de l’ordre civil, ou exclus de l’armée par le fait de leur condamnation » (page 2).
Lettre du ministre de la Guerre au ministre de l’Intérieur concernant la photographie de certaines catégories de condamnés, 29 février 1872
Paris, Archives nationales, F7 12708
Instructions du ministère de la Marine et des Colonies relatives à la photographie des condamnés, 11 août 1871
Paris, Archives nationales, F7 12708
La justice militaire applique, la première, la photographie à l’identification des condamnés. Par la circulaire du 11 août 1871, elle devient systématique pour les condamnés à plus six mois d’emprisonnement par les juridictions militaires des ports. L’objectif est de confondre avec certitude les récidivistes dissimulant leur véritable identité. Le cliché du condamné doit être réalisé par le commissaire aux hôpitaux et prisons, tête nue, cheveux coupés ras et sans barbe. L’épreuve sur papier, de 20 x 30 mm, est tirée en deux exemplaires. Le premier est collé sur la minute du jugement ; le second, sur les ampliations, adressé aux archives centrales du ministère.
Instructions du ministère de la Marine et des Colonies relatives à la photographie des condamnés, 11 août 1871
Paris, Archives nationales, F7 12708
Photographies de victimes ou de prévenus, figurant dans les dossiers du greffe de la cour d’assise du Var, 1865-1872
Draguignan, archives départementales du Var, 2U 500, 525, 530, 536
Dans les greffes des tribunaux, dès le milieu des années 1860, des portraits commencent à nourrir les dossiers de procédure. Dans bien des cas, ils sont de qualité médiocre et maladroitement associés à des notices ou des feuillets signalétiques pré-imprimés transmis par la police ou la gendarmerie. Il n’est pas toujours possible d’établir un lien entre ces photographies isolées, souvent non légendées, et les documents écrits, ce qui traduit le peu de proximité que les autorités judiciaire entretiennent alors avec l’image photographique, réputée peu fiable.
Photographies de victimes ou de prévenus, figurant dans les dossiers du greffe de la cour d’assise du Var, 1865-1872
Draguignan, archives départementales du Var, 2U 500, 525, 530, 536
PLAN DE L'EXPO
- L’affaire. Lurs, 4 août 1952
- Crimes et rapines. Petites et grandes affaires de l’Est parisien (1880-1914)
- L’affaire Fualdès. Le sang et la rumeur
-
Alphonse Bertillon et l'identification des personnes (1880-1914)
- Alphonse Bertillon (1853-1914)
- La loi de 1885 sur les récidivistes
- L'anthropométrie judiciaire
- Le service photographique de la préfecture de police de Paris
- Identification anthropométrique dans les prisons
- La méthode du "portrait parlé"
- Les empreintes digitales face à l'anthropométrie
- Le développement international d'une police d'identification
- L'identification anthropométrique des morts
- Le carnet anthropométrique des "nomades" (1912)
- Bertillonnage et identification civile des populations
- L'anthropométrie dans l'espace colonial français
- L'identité judiciaire, un phénomène culturel
- Bertillon au regard de la presse
- L'impact de la Commune de Paris
- Fichés ? Photographie et identification du Second Empire aux années 60
- La Révolution à la poursuite du crime !
- Les « vrais » Tontons flingueurs
- L'accusé et sa mise en image sous la Troisième République
- Détective, fabrique de crimes ?
- Crimes et châtiments en Normandie (1498-1939)
- Du gibet au palais. Les lieux de justice dans l'Ain
- Présumées coupables, du 14e au 20e siècle