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Doullens - École de préservation pour jeunes filles

En 1530, François 1er fait construire une citadelle de grès à Doullens afin de protéger cette ville devenue ville frontière française suite à la guerre de Succession de Bourgogne à la fin du XVe siècle. Robert Mailly, chargé de sa construction, fait édifier une forteresse de pierre à quatre bastions à orillons et flancs casematés typique des bastions construits dans les années 1530 et 1540 en France et dans les Pays-Bas voisins. La citadelle perd son statut militaire suite au Traité des Pyrénées en 1659 qui rattache l’Artois à la France et servira de lieu de détention au cours des siècles. En 1856, la citadelle de Doullens devient une prison centrale pour femmes. Puis, suite à l’évacuation de la maison d'éducation pénitentiaire de Fouilleuse en Seine-et-Oise en 1892, elle devient une « maison pénitentiaire » pour jeunes filles, institution laïque d’éducation corrective établie par la loi « Corne » du 5 août 1850 sur l'éducation et le patronage des jeunes détenus pour les distinguer des « colonies pénitentiaires » réservées aux garçons. Selon l’article 17 de cette loi, les détenues, insubordonnées ou placées à la demande des familles en vertu du droit de correction paternelle « sont élevées sous une discipline sévère et appliquée aux travaux qui conviennent à leur sexe », c’est-à-dire  employées essentiellement aux travaux domestiques : blanchisserie, couture, repassage, travaux agricoles et petit élevage.

Doullens est la première maison pénitentiaire qualifiée d’école de préservation ouverte par l’administration pénitentiaire le 1er janvier 1895. Suivront l’inauguration de Cadillac – fermée en 1896 puis rouverte sous le nom d’« école de préservation » en 1905 –, et de Clermont-de-l’Oise – ouverte en 1908. L’école de préservation de Doullens comptait initialement deux sections : une école de préservation de 126 cellules individuelles pour les filles jugées coupables mais non discernantes confiées à l’établissement généralement jusqu’à leur majorité civile (21 ans) et un quartier correctionnel de 40 cellules individuelles pour les filles indisciplinées ou ayant été condamnées en récidive légale. Il existait aussi 14 cachots de punition de jour comme de nuit.

A partir de 1915 s’établissent successivement dans la citadelle un hôpital militaire français, puis canadien, qui est bombardé le 30 mai 1918 par un raid aérien allemand. Entre 1941 et 1943, la citadelle devient un camp d’internement sous l’autorité allemande. Entre mars et août 1944, 2500 déportés du camp de Buchenwald sont affectés à Doullens au sein de la SS Baubrigade V pour la construction de sites de lancement de missiles V1 et V2. En 1946, la citadelle redevient une maison centrale de détention de femmes, ou plus exactement une « prison-école » de l’administration pénitentiaire. D’abord prévu pour accueillir les jeunes détenues condamnées pour des faits de collaboration (comme Struthof pour les hommes condamnés), elle recevra ensuite les jeunes majeures pénales condamnées à plus d’un an de prison ferme dont la peine s’achève avant 28 ans révolus jusqu’à sa fermeture et son transfert au grand centre pénitentiaire de Rennes en 1959.