Landmarks / Textes relatifs aux peines et aux prisons en France / De la Monarchie de Juillet à 1914 /

30 octobre 1841. Règlement général pour les Prisons départementales (4/7)

- voir section précédente


CHAPITRE II. RÉGIME ÉCONOMIQUE.

§ 1er. Nourriture des valides.



Art. 56. Pain. Légumes. Soupe.
La nourriture accordée par l’Etat aux prisonniers, dans les maisons d’arrêt, de justice et de correction, se compose, savoir :
1° Pour les hommes, d’une ration de pain du poids de 75 décagrammes, et pour les femmes, d’une ration de 70 décagrammes.
Le pain sera de pur froment avec extraction de 10 kilogrammes de son sur 100 kilogrammes de grain mis sous la meule.
Il ne sera distribué qu’après 24 heures de cuisson.
2° D’un litre de bouillon au beurre ou à la graisse, avec des légumes verts ou secs, suivant la saison, le sel et le poivre nécessaires à l’assaisonnement.
La quantité de beurre ou de graisse, et celle des légumes, pour chaque litre de bouillon, sera déterminée par le Règlement particulier de la prison.
La soupe sera partagée en demi-ration : l’une sera donnée le malin, l’autre le soir.
Les femmes enceintes et les nourrices pourront, sur l’avis du médecin, recevoir une ration supplémentaire.

Art. 57. Service gras.
Le jeudi ou le dimanche de chaque semaine, il sera servi aux prisonniers une soupe grasse, dans la composition de laquelle on aura fait entrer, pour chaque prisonnier, 200 grammes de viande de bonne qualité, les légumes, le sel et le poivre nécessaires. La viande provenant de celle soupe sera partagée par portions égales entre tous les détenus.
Il entrera dans chaque ration de soupe grasse ou maigre 90 grammes de pain blanc bien rassis.

Art. 58. Faculté alimentaire accordée aux prévenus et accusés.
Les prévenus et les accusés peuvent, dans les limites fixées par le Règlement de la prison, faire venir du dehors, et à leurs frais, les vivres dont ils auront besoin.
S’ils pourvoient eux-mêmes à leur nourriture, ils cessent d’avoir droit aux vivres de la maison.

Art. 59. Boissons défendues ou permises aux prévenus et accusés.
L’usage de l’eau-de-vie et des liqueurs spiritueuses est interdit aux prévenus et aux accusés. Quant au vin et autres boissons fermentées, le Règlement particulier de chaque prison déterminera dans quel cas et en quelle quantité ils pourront en faire usage.

Art. 60. Détenus pour dettes.
Les détenus pour dettes envers les particuliers peuvent, dans les limites fixées par le Règlement de la prison, recevoir leur nourriture du dehors, et en traiter de gré à gré.
Ils peuvent aussi prendre les vivres de la prison, au prix du marché dans le cas d’entreprise, ou au prix fixé par le préfet dans le cas de régie.

Art. 61. Cantine.
Toute vente connue sous le nom de cantine est prohibée.

Art. 62. Restrictions alimentaires imposées aux condamnés.
Les condamnés peuvent être autorisés individuellement, par le préfet ou par le sous-préfet, sur l’avis de la commission de surveillance, à recevoir de leurs familles, ou à faire venir du dehors, les aliments dont l’usage aura été autorisé par le Règlement de la prison.

Art. 63. Boisson des condamnés. Tabac prohibé.
L’usage de l’eau-de-vie, du vin, du cidre, de la bière et de toute autre boisson spiritueuse ou fermentée, est expressément interdit aux condamnés, il en est de même du tabac.


§ 2. Vêtements.




Art. 64. Vêtements personnels des prévenus et des accusés.
Les prévenus et les accusés conserveront leurs vêtements personnels, à moins qu’il n’en soit autrement ordonné par l’autorité administrative dans un intérêt de police et de propreté, ou par l’autorité judiciaire, dans l’intérêt de l’instruction.
Ils pourront également faire venir du dehors, et à leurs frais, les vêtements dont ils auront besoin.

Art. 65. Costume pénal.
Les condamnés correctionnels qui subissent leurs peines dans les prisons départementales seront tenus de porter le vêtement de la maison, excepté ceux qui en seraient expressément dispensés par décision du préfet, sur l’avis de la commission de surveillance.

Art. 66. Costume pénal des hommes.
Le vêtement de chaque prisonnier se composera :
1° D’un pantalon, d’un gilet et d’une veste d'étoffe de laine, fil ou coton, suivant la saison ;
2° D’une chemise qui sera régulièrement changée tous les huit jours ;
3° D’une paire de sabots.

Art. 67. Costume pénal des femmes.
Le vêtement des femmes se composera d’une camisole à manches, en laine ou en coton, suivant la saison ; d’un jupon de même étoffe; d’un jupon de dessous en tissu commun ; d’un fichu pour le col; d’un autre fichu pour la coiffure de jour ; d’une paire de chaussettes ou de chaussons ; d’un tablier pour le travail ; de sabots ; d’une cornette pour la nuit, et d’une chemise.

Art. 68. Vêtements supplémentaires.
L’administration pourra permettre aux condamnés, pour raison de santé, l’emploi de vêtements supplémentaires qui ne changeront rien au costume pénal.

Art. 69. Effets des détenus.
Les effets des condamnés entrants seront lavés, désinfectés, étiquetés et mis en magasin pour leur être rendus à leur sortie. Des vêtements appartenant à la prison leur seront donnés immédiatement après que les mesures de propreté auront été exécutées à leur égard.
Les effets des prévenus et des accusés seront, en cas de besoin, lavés et désinfectés de la même manière. Des vêtements appartenant à la prison leur seront également donnés, s’il y a lieu.



§ 3. Coucher.




Art. 70. Coucher des détenus.
Le coucher des prisonniers se composera, pour chacun :
1° D’un hamac ou d’une couchette en bois ou en fer, de 70 centimètres de largeur sur 1 mètre 95 centimètres de longueur, pouvant, au besoin, s’enlever ou se relever pendant le jour ;
2° D’une paillasse ;
3° D’un traversin en paille ;
4° D’un drap plié en deux, ou de deux draps cousus ensemble dans une longueur de 1 mètre 60 centimètres, et non cousus pour le reste ; ces draps seront changés tous les mois ;
5° D’une couverture en été, et de deux couvertures en hiver.
La paille des paillasses et des traversins sera renouvelée aussi souvent qu’il sera jugé nécessaire par la commission de surveillance, et suivant ce qui sera déterminé par le Règlement particulier de la maison.

Art. 71. Effets de coucher apportés du dehors.
Les prévenus et les accusés spécialement autorisés par le préfet ou par le sous-préfet, sur l’avis de la commission de surveillance, pourront, dans les limites fixées par le Règlement particulier de la maison, faire venir du dehors les effets de coucher dont ils désireront faire usage.

Art. 72. Pistole permise aux prévenus et accusés. Tarif.
Dans les prisons où il ne pourra y avoir de fournisseur chargé de la location des effets dits de pistole, le gardien pourra être autorisé à louer pour son propre compte, aux prévenus et aux accuses qui le demanderont, les meubles, linges et effets de literie à lui appartenant, moyennant une rétribution quotidienne, hebdomadaire ou mensuelle, fixée, pour chaque objet, dans un tarif arrêté par le préfet ou par le sous-préfet, sur l’avis de la commission de surveillance.
En tout cas, le gardien ne pourra accorder aux prévenus et aux accusés, comme chambres de pistole, que celles qui auront été spécialement affectées à cet usage par le préfet ou le sous-préfet, également sur l’avis de la commission.

Art. 73. Pistole permise aux détenus pour dettes.
Les détenus pour dettes envers les particuliers peuvent faire apporter, dans la prison, des meubles et effets de coucher pour leur usage. Mais ils doivent préalablement adresser une demande à cet effet au préfet ou au sous-préfet, qui, sur l’avis de la commission de surveillance, détermineront les objets dont l’introduction sera permise.
Le prix de location des meubles et effets de coucher, que le fournisseur ou le gardien pourra louer aux détenus pour dettes, sera réglé, pour chaque objet, ainsi qu’il est prescrit par l’article précédent.

Art. 74. Pistole des condamnés prohibée.
La location connue sous le nom de pistole est prohibée dans toutes les prisons pour peine.