Salle capitulaire, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

En janvier 2015, fut présenté le renouvellement de l’espace muséographique consacré depuis quelques années dans l’Abbaye Royale de Fontevraud[1] à l’évocation de sa période pénitentiaire.


[1] À Fontevraud-l’Abbaye (Maine-et-Loire, France). Sauf citation, l’orthographe adoptée ici reprend le nom officiel de la commune ; jusqu’au xxe siècle, une forme courante fut Fontevrault, variante utilisée pour la majeure partie des archives de la maison centrale (plus rarement Fontevrauld).

Ancien logis abbatial, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

La maison centrale de Fontevraud occupa en effet plus d’un siècle et demi durant le site de l’abbaye fondée en 1101 par Robert d’Arbrissel. Ce prédicateur itinérant créa ici un ordre religieux original où une abbesse dirigeait un monastère double, composé de couvents de frères et de moniales.

Atelier, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

L’abbaye eut un destin hors du commun du fait du prestige de ses abbesses, issues de puissants lignages voire de sang royal. Elle fit un temps office de nécropole dynastique des souverains Plantagenêt et l’on y admire encore les gisants d’Henri ii, d’Aliénor d’Aquitaine ou de Richard Cœur de Lion.

Atelier, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Bien plus tard, les quatre plus jeunes filles de Louis XV y passèrent une partie de leur enfance. Le complexe abbatial, articulé sur quatre couvents (le Grand-Moûtier, Sainte-Marie-Madeleine, Saint-Lazare et Saint-Jean-de-l’Habit), devint l’un des plus étendus d’Europe et conserve des ensembles architecturaux majeurs du xiie et des xvie-xviiie siècles.

Atelier, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

L’abbaye n’échappa pas au sort des établissements monastiques lors de la Révolution : l’ordre fut dissout, les religieuses et religieux chassés et les bâtiments saisis comme biens nationaux[1]. Plusieurs lots en furent distraits qui devinrent des biens privés, l’un des couvents, celui des frères de Saint-Jean-de-l’Habit, étant même démoli pour servir de matériaux de construction, destin partagé avec Cluny, Jumièges et bien d’autres.


[1] Voir : Claire Giraud-Labalte, Les Angevins et leurs monuments, 1800-1840, Angers : Société des Études Angevines, 1996 (notamment p. 61-78) ; id. « Fontevraud au xixe siècle, une prison dans une abbaye », 303, Arts, Recherches, Créations, 1984, n°0, p. 8-25 ; id., « D’une clôture à l’autre, l’abbaye devient prison », 303, Arts, Recherches, Créations, 2000, n°67, p. 56-65.

Atelier, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

La question des bâtiments principaux, les couvents féminins, trop vastes pour trouver acquéreur, se posa à l’administration publique. Pour occuper les lieux et rendre au village un pôle actif, divers projets de réaffectation furent envisagés, comme un hôpital général ou une fabrique de voiles en toile de chanvre. En attendant de statuer sur son devenir, le site, pillé et fortement dégradé lors des événements révolutionnaires, fut baillé à un salpêtrier qui loin de s’en tenir aux murs qu’on lui désignait jeta à terre nombre de bâtiments de qualité.

Atelier, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Le décret napoléonien adopté le 26 vendémiaire an xiii (18 octobre 1804) affecte les locaux de l’ancienne abbaye à un établissement central destiné à accueillir les détenus de plusieurs départements du Val de Loire et de la France de l’ouest. De longs travaux sont alors engagés pour transformer les bâtiments en pénitencier, réalisés dans un premier temps par l’entrepreneur Alexandre Jean-Baptiste Cailleau sous la conduite de l’ingénieur Charles-Marie Normand qui avait été chargé, en amont, d’établir la faisabilité d’un tel projet.

Atelier, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

L’inauguration officielle de la prison a lieu le 3 août 1814, sans que les travaux ne soient achevés. Normand est relevé de ses fonctions en 1816 après avoir vu progressivement dériver son projet. Les travaux ne cessent d’ailleurs pas pour autant et l’histoire de la maison centrale est celle d’un chantier permanent. Une fois le plan d’ensemble réalisé, en effet, des constructions complémentaires s’ajoutent au fil du xixe et de la première moitié du xxe siècles.

Atelier de menuiserie, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Celui-ci, animé d’un esprit mêlant raideur et humanisme, veut concevoir dans le cadre contraint de l’abbaye un établissement sécurisé, mais qui puisse offrir des conditions propres à permettre aux détenus d’effectuer leur réinsertion, voire leur rédemption. La clôture monastique est adaptée et une enceinte intérieure supplémentaire est édifiée.

Atelier, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Prévue initialement pour quelques centaines de détenus, puis 1000 à 1200, dans les premiers temps, la prison abrite sans compter les nombreux gardiens près de 1800 prisonniers au milieu du xixe siècle.

Bâtiment, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Après cette période, leur nombre décroît progressivement et ils ne sont qu’environ 200 vers 1960. À cette ville carcérale à géométrie intérieure variable, qui accueillit aussi des femmes jusqu’en 1850 et des enfants jusqu’en 1860, ce qui augmentait les partitionnements, il faut donc régulièrement de nouveaux bâtiments, dortoirs, ateliers ou locaux techniques, des réorganisations des cheminements, mais aussi de nouveaux types de lieux de détention, comme en 1862 le quartier cellulaire d’isolement qui adopte une organisation panoptique.

Cages à poule, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Il en est ainsi durant près d’un siècle et demi. Puis, à la fois rumeur de longue date et information soudaine, la décision tombe : en 1963, la prison doit fermer ses portes. Pour accommoder chacun, on choisit de laisser subsister un temps, jusqu’en 1985, un petit effectif de gardiens et de détenus, repliés dans la partie nord-est de l’enceinte, le quartier de la Madeleine.

Chauffoir, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Il faut désormais faire vite place nette de la prison pour accompagner le site vers sa nouvelle vocation : retrouver l’ancienne abbaye et l’ériger en un haut lieu de culture et de tourisme, animé dès 1975 par un centre culturel de rencontre, le Centre culturel de l’Ouest (CCO).

Cloître du Grand Moustier, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Après pareille reconversion, peu subsiste des diverses constructions érigées par le Ministère de la Justice et les architectures et objets de la prison sont aujourd’hui souvent réduits à l’état de vestiges sur le site de l’Abbaye Royale de Fontevraud.

Cloître Saint-Lazare, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Pourtant, par un faisceau de facteurs différents, un processus de patrimonialisation naquit peu à peu pour redonner sens et lisibilité à ces traces la période carcérale. Parmi ces initiatives, deux démarches récentes agissent pour la mise en valeur matérielle et immatérielle du passé pénitentiaire de Fontevraud : un recueil de témoignages conduit par le Service du patrimoine de la Région des Pays de la Loire et l’inscription au rang des monuments historiques de l’ensemble des objets liés à la prison conservés in situ par la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) des Pays de la Loire.

Cour intérieure, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Cuisines, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Cuisines, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Le directeur dans son bureau, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Détenu en promenade au cloître Saint-Lazare, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Grille d'entrée de la détention, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Grille d'entrée de la détention, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Jardin à hauteur du logis Bourbon, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Le médecin officiant, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Moulin, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Mur d'enceinte, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Pavillon d'entrée, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Porte de cellule, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Porte, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP

Salle de discipline, 1918-1939

Source : Henri Manuel/ENAP