Le 13 août 1940, l’architecte départemental en chef établissait un rapport d’ensemble « sur l’état actuel de la maison centrale de Loos » dans lequel il notait que « la maison centrale de Loos, rendue inhabitable par suite des bombardements de mai 1940, a dû être évacuée et n’est plus utilisée dans sa majeure partie ». La prison cellulaire fut également touchée par une trentaine d'obus. Une seconde vague de bombardements eut lieu le 8 juillet 1941 à 15 heures. Le domaine pénitentiaire fut à nouveau bombardé le 10 avril 1944.
5. Loos au XXème siècle
Plan du chapitre
Loos au XXème siècle
La prison cellulaire, que les Allemands avaient déjà investie pendant la première guerre mondiale pour y enfermer des otages, fut découpée, quoiqu’elle aussi très touchée par les bombardements, en un quartier allemand (inaccessible au personnel français) et un quartier français. Si l’aile A demeura française, les ailes C et D devinrent administrées par les Allemands. La cuisine seule était commune aux deux sections. Dans la section allemande, les femmes trouvèrent à se loger dans 50 cellules de l’aile C, cependant que les « terroristes » occupèrent une partie des 129 cellules de l’aile D. Dans la section française, les femmes furent logées dans le quartier F, l’aile ouest du bâtiment administratif. A partir de la fin mai 1941, l’étanchéité devint absolue entre les quartiers allemand et français : les Français conservèrent la porte principale cependant que les Allemands percèrent un accès muni d’une lourde porte de bois dans la face nord du mur d’enceinte. A partir de juin 1940, la prison cellulaire de Loos et ses annexes servent de plaque tournante vers la déportation. L’afflux massif de prisonniers en juillet et surtout en août 1944 fait passer la population de Loos à 1 300 détenus environ, qui s’entassent à 7 ou 8 dans des cellules de 9m2....
Le "grand drame de la déportation dans le Nord - Pas-de-Calais
Le 1er septembre 1944, la grève est générale dans le bassin minier, l’armée allemande quitte Lille, faisant sauter ses dépôts de munitions ; à midi, les Anglais sont à Carvin. Les accrochages entre résistants et soldats allemands sont violents et meurtriers. De nombreux civils sont fusillés à Bruay, à Seclin, à Englos. A la prison de Loos, des détenus sont amenés, entre 5 h 30 et 17 h 30, par camions, à la gare de Tourcoing. Ils seront entassés à 80 voire 90 par wagon. Les recherches d’Yves le Maner ont permis d’identifier avec précision les 816 déportés du train de Loos. 722 ont été déportés comme résistants, les autres sont des otages, des réfractaires au STO (service du travail obligatoire en Allemagne), plus quelques « droit commun ». En octobre 1944, commence la grande dispersion des déportés du train de Loos : vers Kokendorf et ses mines de sel, vers l’île d’Usedom sur la Baltique, centre d’essai des fusées, vers Karlslagen. Au printemps 1945, devant l’avance des alliés, les chefs SS des camps organisent l’évacuation vers la Baltique ; ce sont les abominables marches de la mort qui seront fatales à des centaines de déportés du train de Loos. Le terrible bilan fait état de 561 décès et de 275 survivants.
A leur retour, quelques rescapés ont créé « l’association des rescapés du train de Loos » en mémoire de leurs camarades disparus et de leur famille. Le premier lieu de mémoire fut matérialisé le 16 novembre 1947 par la pose d’une plaque sur un mur de la gare de Tourcoing. Depuis, les lieux se sont multipliés (places, squares, rues…). Un mémorial est entretenu en face de la prison.
Reconstruire la maison centrale
Au sortir de la guerre, Loos dispose toujours de ses trois prisons : la maison centrale, inutilisable, la prison cellulaire pour les hommes et son annexe de Saint-Bernard pour les femmes. Est venu s’y ajouter un « centre pénitentiaire », installé au fort de Seclin. Deux maisons centrales ont été détruites ou gravement endommagées pendant la guerre : Caen et Loos. Les travaux de reconstruction commencent à Loos dès 1946.
La réforme Amor consiste, appliquée sur le terrain, principalement dans des opérations de tri. Elle est tournée en priorité vers les établissements pour peine, là où le traitement peut être mis en œuvre. Bien que la maison centrale de Loos soit en reconstruction (celle-ci ne sera achevée qu’en 1960), le domaine pénitentiaire de Loos n’échappe pas complètement à la réforme. Si une première annexe psychiatrique fut inaugurée à Toulouse le 16 juin 1947, celle de la maison d’arrêt de Loos la suivit de peu, le 2 juillet 1947. 3 000 prévenus furent ainsi détectés par 8 médecins de la région de Lille. Au début du mois d’avril 1950, y furent affectés 2 surveillants spécialisés par des stages dans un hôpital psychiatrique (Armentières). La maison centrale de Loos fut également l’un des « centres de triage » des relégués, avec les maisons d’arrêt de Rouen, Saint-Etienne et Besançon.
La mutinerie de 1974
En 1974, la maison centrale de Loos est une « prison-école » qui accueille de jeunes condamnés de moins de 30 ans. Elle est, comme nombre d’établissements pénitentiaires de l’époque, sous tension. À 14 heures, le jeudi 25 juillet, soixante détenus refusent de réintégrer leur cellule. Ils se répandent dans l’établissement car ils ont subtilisé des clés à des surveillants, sans cependant les retenir en otages. Ils ouvrent les portes des cellules à leurs camarades puis incendient la salle de cinéma, le cabinet médical et la lingerie. Une quinzaine d’entre eux gagnent le toit qu’ils saccagent, ce qui attise encore les brasiers notamment dans les différents ateliers (forge, mécanique automobile, électricité, cartonnages, etc.).
Le centre de détention (ancienne maison centrale) est un établissement destiné à des hommes définitivement condamnés. Il accueillait en 2006 entre 350 et 370 détenus, âgés pour la plupart de 20 à 35 ans. Une soixantaine d’entre eux sont des étrangers (un quart venant du Bénélux), les autres sont originaires de la région Nord - Pas-de-Calais dont la moitié du territoire de la communauté urbaine de Lille. La plupart des détenus sont libérés dans les deux années suivant leur arrivée à l’établissement. Seul un dixième d’entre eux est libérable au-delà de l’année 2010. La maison d’arrêt recevait jusqu’en mars 2005 des hommes et des femmes, majeurs ou mineurs, qui étaient soit placés en détention provisoire (prévenus, en attente de jugement), soit condamnés (par une décision de justice) à une peine d’emprisonnement d’une durée inférieure ou égale à un an. Depuis le 2 avril 2005, elle a vocation à accueillir uniquement des hommes majeurs condamnés, dont la peine ou le reliquat de peine est inférieur ou égal à dix-neuf mois. Elle est la première des trois entités administratives qui composent la maison d’arrêt de Lille-Loos-Sequedin, avec l’UHSI (unité hospitalière sécurisée interrégionale, sise au centre hospitalier régional universitaire), ouverte en décembre 2004, et la maison d’arrêt de Lille-Sequedin, ouverte en avril 2005. En octobre 2011, le site a été fermé pour cause de vétusté. une démolition s'en est suivie en 2017. Seuls les bâtiments de l'ancienne abbaye ont été conservés.