Législation / Textes relatifs aux peines et aux prisons en France / De la Monarchie de Juillet à 1914 /

30 octobre 1841. Règlement général pour les Prisons départementales (3/7)

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§ 6. Dispositions communes aux paragraphes précédents.




Art. 34. Uniforme.
Le directeur, le gardien-chef et les gardiens auront un uniforme, qu’ils seront tenus de porter constamment dans l’exercice de leurs fonctions.
Il y aura, dans l’uniforme, une marque instinctive :
1° Pour les gardiens des chefs-lieux de département, et pour les gardiens des chefs-lieux d’arrondissement qui seront le siège d’une maison de justice ou d’une maison centrale de correction pour le département ;
2° Pour les gardiens des chefs-lieux d’arrondissement.
Les dispositions ci-dessus sont applicables aux surveillantes.
L’uniforme déterminé par le ministre sera le même dans tout le royaume.

Art. 35. Prohibition de tout service extérieur ou étranger.
Le gardien-chef et les gardiens étant exclusivement préposés à la surveillance et au service intérieur de la prison, ils n’en peuvent jamais être détournés, sous aucun prétexte et à aucun titre, pour quelque service extérieur que ce soit 1 .
Ils ne pourront non plus exercer aucune autre fonction.

Art. 36. Permissions de sorties et congés.
Lorsqu’il n’y a pas de directeur, les absences momentanées du gardien-chef et des gardiens sont autorisées par le maire. Les congés sont accordés par le préfet.
Les gardiens ne peuvent sortir de la prison tans la permission du gardien-chef, cl celui-ci ne peut découcher sans y être autorisé par le maire ou par le directeur.

Art. 37. Infliction des punitions.
Si la prison a un directeur, les punitions sont prononcées par lui, sur le rapport du gardien-chef et après avoir entendu le détenu.
Lorsqu’il n’y a pas de directeur, le gardien-chef qui inflige une punition à un détenu doit en référer au maire dans les vingt-quatre heures au plus tard 2 .

Art. 38. Registre des punitions.
Le gardien-chef tient un registre des punitions. Les motifs de chacune y sont énoncés et visés par le maire, en regard du nom du détenu puni.

Art 39. Visites dans la prison. Permissions.
Hors les cas de permissions délivrées par le préfet ou par le sous- préfet, et dont le maire sera toujours informé, aucune personne étrangère à l’administration de la prison ou à la surveillance légale des détenus ne pourra visiter la prison ou les prisonniers, sans une permission écrite du maire.
Cette permission sera un ordre obligatoire pour le gardien, à moins que le détenu désigné dans le permis ne soit en punition, et sans préjudice des ordres qui auraient pu être donnés par le juge d’instruction ou par le président des assises, en vertu de l’article 613 du Code d’instruction criminelle.

Art. 40. Fouille.
Aucun objet, de quelque nature qu’il soit, ne peut être introduit dans la prison ou en sortir, qu’après avoir été visité par le gardien.
Le gardien prend la même précaution pour tout ce que les détenus reçoivent du dehors 3 .

Art. 41. Prohibitions imposées à tous les employés.
II est expressément défendu à tout employé, gardien ou préposé :
D’occuper des détenus pour son service particulier ;
De recevoir aucun présent d’eux ou de leurs parents ;
De leur vendre quoi que ce soit ; ni faire pour eux aucune commission ;
De faciliter leur correspondance ou l’introduction de vivres, boissons ou tous autres objets prohibés ;
D’influencer directement ou indirectement les prévenus et les accusés sur le choix de leurs défenseurs. (voir art. 102.)
De boire ou de manger avec les détenus ou avec leurs parents, sans en excepter les détenus pour dettes, qui ne pourront prendre leurs repas ni avec le gardien, ni dans son logement ;
De retarder, par faveur, le départ de condamnés désignés par l’autorité administrative pour être transférés les premiers aux bagnes ou aux maisons centrales de détention.
Enfin, de tutoyer les prisonniers et d’avoir avec eux aucune sorte de conversation familière.

Art. 42. Contravention aux prohibitions. Peines.
Tout gardien qui contreviendra aux prohibitions de l’article précédent, ou à celles du Règlement particulier de chaque prison, sera puni de la mise aux arrêts ou de la suspension de ses fonctions, avec ou sans privation de traitement, ou bien encore de la révocation, selon la gravité des circonstances, ou en cas de récidive.

Art. 43. Ivresse.
Tout gardien qui se sera mis en état d’ivresse sera destitué.




§ 7. Médecins et Pharmaciens.



Art. 44. Nomination.
Le service de santé est fait par un médecin nommé par le préfet. Ce médecin ne peut faire partie de la commission de surveillance de la prison.
En cas d’absence ou d’empêchement, il sera remplacé par le médecin qui aura été désigné par le préfet ou par le sous-préfet.

Art. 45. Visite quotidienne.
Le médecin est tenu de faire, chaque jour, une visite dans la prison.

Art. 46. Ordonnances. Mémoires du pharmacien.
Les prescriptions du médecin sont toujours faites par écrit.
Elles sont remises, par les soins du directeur ou du gardien-chef, après avoir été revêtues de son visa , au pharmacien chargé de la fourniture des médicaments , lequel doit toujours et nécessairement les reproduire à l’appui de ses mémoires.

Art. 47. Registre ad hoc.
Le médecin visite la prison, les ateliers, les dortoirs, les lieux de punition, etc., etc., au moins tous les quinze jours.
Il propose des fumigations et autres moyens de salubrité, toutes les fois qu’il le juge nécessaire.
Il est tenu de consigner ses observations sur un registre ad hoc.

Art. 48. Rapport annuel.
A l’expiration de chaque année, le médecin fait un rapport sur les maladies qui ont’régné dans la prison et sur leurs causes. Le rapport est adressé au sous-préfet qui le transmet au préfet.


§ 8. Aumônier et Instituteur.




Art. 49. Nomination de l’aumônier.
Un aumônier, nommé par le préfet, sur la proposition de l'évêque, est attaché à chaque prison.

Art. 50. Office divin. Instruction religieuse.
L’aumônier célébrera la messe les dimanches et fêtes dans l'établissement. Les heures des offices, des instructions et autres services religieux seront fixées par le Règlement particulier.
Il fera aux détenus une instruction religieuse, une fois par semaine au moins, et le catéchisme aux jeunes détenus qui n’auront pas fait leur première communion.

Art. 51. Servants de la chapelle.
L’aumônier peut choisir parmi les détenus, et d’accord avec le chef delà prison, les servants de la chapelle.

Art. 52. Visites.
L’aumônier visite les infirmeries, et se rend auprès des malades qui le font demander.
Ses visites périodiques dans la prison ont lieu au moins deux fois par semaine.

Art. 53. Décès.
L’aumônier est informé de chaque décès.

Art. 54. Cultes dissidents.
Les dispositions ci-dessus sont communes aux ministres des autres cultes.

Art. 55. Nomination de l’instituteur.
Un instituteur, réunissant les conditions d’aptitude et de capacité voulues par la loi du 28 juin 1834, pourra être nommé, par le préfet, dans les prisons dont la population le comportera.



Notes

1.

Notamment pour conduire les prévenus à l’interrogatoire et faire l’office d’agents, de commis ou de commissionnaires des juges d’instruction ou des parquets, ainsi que cela a lieu, abusivement encore aujourd’hui, de la part de beaucoup de gardiens.

2.

Il y a cette différence entre le directeur et le gardien-chef que le premier peut infliger une punition de sa propre autorité, tandis que le second ne le peut, hors les cas d’urgence, que sur l’ordre qui lui est donné par le maire.

3.

Comme conséquence de cet article, le gardien-chef peut fouiller les détenus toutes les fois qu’il juge cette précaution nécessaire. Il peut même fouiller les visiteurs et saisir les objets prohibés dont ils seraient nantis, sous la condition d’en référer au maire (Instruction du 27 mai 1842)