Apache au « surin »
Source : Le Petit Journal, 20 octobre 1907
Fauteurs de troubles
Jeunes, défiant l’ordre social, les Apaches ou « Aminches » composent d’hétérogènes bandes réunies autour d’un chef respecté. Certaines acquièrent de redoutables réputations. La bande du 140 rue de Ménilmontant se frotte volontiers à celle de la rue Maurice-Berteaux, sise au pied des fortifications, en pleine zone « non aedificandi ».
La nuit venue, l’Apache détrousse le bourgeois imprudent, n’hésitant pas à faire usage de violence en cas d’opposition, avant de « prendre l’escampe » et de mettre à l’abri le produit de son larcin.
Bandes costumées
Façonnée par la gravure de presse, l’identité de l’Apache est celle d’un marginal vêtu d’étrange manière et refusant le travail, l’image même de l’oisiveté et du vagabondage, un délit condamné jusqu’en 1992.
Étrange parodie de la respectabilité bourgeoise, la casquette de travers et le veston débraillé, le voyou parisien est assimilé à l’indigène de l’Ouest américain auquel il emprunte certains attributs : le port de vives couleurs, le couteau ou « surin » au poing, le goût pour l’attaque preste et feutrée.
Dominique François Leca, dit le Corse, apprenti découpeur sur métaux, chef de la bande des « Popinc’», cliché anthropométrique
Source : Archives de la Préfecture de Police
Avec diligence
Emblématique d’une vision échevelée de « l’Est sauvage », la diligence reste l’accessoire incontournable des scènes de poursuites.
Jadis Cartouche, célèbre bandit actif sous la Régence, attaquait les diligences et redistribuait une partie de ses gains aux déshérités qui constituaient son vaste réseau. Appréhendé rue des Couronnes puis exécuté en place publique en 1721, Cartouche reste une figure incontestée du brigandage.
À l’aube du XXe siècle, Dominique Leca dit le Corse, blessé dans une rixe et soigné à l’hôpital Tenon, est récupéré par ses comparses de la bande de « Popinc’ » (Popincourt, XIe arrondissement). Leur fiacre est pris en chasse par la bande adverse des Orteaux, dirigée par Joseph Pleigneur dit Manda.
Joseph Pleigneur, dit Manda, chef de la bande des « Orteaux », cliché anthropométrique
Source : Archives de la Préfecture de Police
La dent dure
Dix ans plus tard, en 1911, un journaliste du Matin saute à bord d’un fiacre stationné à l’angle de la rue des Cendriers et du boulevard de Ménilmontant pour échapper à de tenaces poursuivants qui en veulent à sa bourse.
Sous sa plume, l’aventure devient un énième épisode des turpitudes en « territoire d’Apachie ».