Au XIXe siècle, le pénitencier d'Eastern State fut la prison la plus célèbre et la plus coûteuse jamais construite au monde mais, désormais, il n'est plus de nos jours que l'ombre de lui-même, hanté par les ruines, les cellules délabrées et les tours de garde désertes. Connue pour son impressionnante conception architecturale et la discipline très stricte qui y régnait, cette prison avait été conçue pour inspirer le remord ou le regret sincère dans le coeur des prisonniers et elle fut le premier vrai « pénitencier » de cette période. Fondé en 1829 par le Commonwealth de Pennsylvanie, il fonctionna jusqu'en 1970 : les cellules en arc de voûte uniquement éclairées par la lumière du jour accueillirent nombre des malfaiteurs les plus connus des États-Unis, dont le voleur de banque « Slick Willie » et Al Capone. La ville de Philadelphie s'en servit comme d'une prison pendant quelques mois encore en 1971 ; après quoi, le site fut laissé à l'abandon et personne ne s'en préoccupa pendant plus de vingt ans.
Aujourd'hui, ce pénitencier assez abîmé a été reconverti en un lieu culturel qui abrite un musée à visée éducative, ainsi que des expositions, des événements culturels et des installations artistiques créées pour cet endroit en particulier. Alors que les États-Unis détiennent le taux de détention le plus élevé au monde avec 2,2 millions de citoyens incarcérés, ils n'ont pas de musée national de la détention : le pénitencier d'Eastern State pourrait donc bien jouer ce rôle. En plus du programme éducatif lancé au milieu des années 1990, le pénitencier a en effet mis en place des espaces d'échanges avec le public afin que l'on puisse y débattre de criminalité, de justice et des changements qui parcourent l'histoire du système pénal des États-Unis. Si la ville de Philadelphie est propriétaire des lieux, c'est le Site historique du pénitencier d'Eastern State, organisme à but non lucratif, qui est chargé de leur gestion.
L'auteur, Sara Jane Elke, est présidente et directrice générale du Site historique du pénitencier d'Eastern State.
Traduction française : Florence Cabaret
Cette exposition est issue d'un article publié dans le volume n°11 de la revue Histoire pénitentiaire consacré au patrimoine et à l'architecture carcérale.
Assemblage : Jean-Lucien Sanchez, chargé d’études en histoire, Laboratoire de recherche et d’innovation de la Direction de l’administration pénitentiaire (ministère de la Justice).
Edition en ligne : Delphine Usal, chargée d’édition, Centre pour les humanités numériques et l’histoire de la justice (CLAMOR, UAR 3726)