7. Aimer ou détester la police

Plan du chapitre

A la fin du XVIIIe siècle, le Parisien avait peut-être « autant de raisons d’aimer que de détester la police » (Steven Kaplan). Le nouveau « style » de police administratif qui s’est affirmé au cours du siècle, l’émergence d’acteurs professionnalisés, suscitent des résistances parfois explosives. En particulier dans les milieux populaires dont les solidarités comme les genres de vie peuvent être mis à mal par ces nouveautés. Pour se faire aimer, la police parisienne s’est efforcée d’améliorer le recrutement et les pratiques de ses agents, en plus de sa vigilance traditionnelle dans le domaine des subsistances et de la philanthropie des politiques éclairées menées depuis les années 1760.
Pourtant, la police peine à admettre une demande de débat public sur son organisation et ses manières de faire. Les réformes libérales de L’Averdy puis de Turgot ont jeté un doute sur l’étendue exacte de ses compétences et son rôle dans la société. Confrontée à l’aggravation de la crise politique, économique et sociale à la fin des années 1780, elle ne sait pas répondre à une aspiration croissante à la garantie des libertés individuelles. En 1789, la police est sur la sellette, comme l’Ancien Régime lui-même. (VM et VD)

Des rébellions ordinaires à la crise ouverte

Arlette Farge. Centre de recherches historiques, EHESS.
Durée : 13' 08''
Crédits : Archives nationales/José Albertini

Résister à la police et aux figures de l’autorité est un fait endémique. L’hostilité aux forces de l’ordre s’exprime lorsque les règles coutumières du quartier ou du métier ne sont plus respectées, lorsque l’action de la police ou de ses agents semblent illégitime. A côté des réactions épidermiques suscitées par un officier maladroit, ou des émotions sporadiques provoquées par une scène d’arrestation, il y a aussi des soulèvements de plus grande ampleur. Ils surviennent lorsque l’action policière, ressentie comme peu réparatrice, créé un sentiment d’injustice aigu et suscite un fort rejet. (VM)

L’hostilité aux hommes de la police

Pourquoi la mouche Labbé a été remise à la foule et massacrée à coups de bâtons

Source : Archives nationales

Louis Dominique Cartouche n’a jamais volé aux riches pour donner aux pauvres ; c’était un voleur brutal, très influent dans la pègre parisienne des années 1710 à 1720. C’est plutôt son hostilité à l’égard des hommes du lieutenant général de police d’Argenson qui assura sa notoriété auprès du peuple : il tue un inspecteur (crime que les autorités garderont secret) ; arrêté, il s’évade de manière spectaculaire ; traqué, il attaque les exempts, poursuit les mouchards dans les rues et élimine ses proches devenus espions. Ce masque mortuaire, réalisé après son exécution sur son cadavre afin d’être montré à une clientèle aisée, témoigne de l’engouement du public pour ce voleur. La littérature se chargera de transformer cette notoriété en une légende politiquement correcte : le tueur de policiers deviendra un bandit au grand cœur. [IF]

L’arrestation d’un mendiant est souvent l’objet d’une forte résistance du peuple de Paris. Claude Roux, brigadier des archers de l’Hôpital témoigne : « que le 15 janvier [...] passant rue Mazarine avec sa brigade et conduisant un mendiant, ils auraient été assaillis par une quantité d’écoliers qui les auraient poursuivis à coups de pierres et morceaux de bois ». Pierre Antoine Rigolet, archer de l’Hôpital, « aurait entendu une fruitière […] dire par trois fois "Tuez-moi ces bougres-là" en montrant le déposant qui tenait ledit mendiant et sa brigade ». Charles Houdry, maître menuisier, témoigne, en écho, de la violence des archers, ayant tous l’épée à la main : « il aurait vu lesdits archers aller plusieurs fois sur lesdits écoliers et populace qui criaient sur eux "À la soupe" et leur auraient jeté quelques pierres, qu’un jeune écolier qui n’était point du nombre de ceux suivant les archers, serait entré, paraissant avoir peur, dans l’allée de lui déposant où un desdits archers serait venu lui porter un coup de son épée nue sur la tête, qu’aussitôt un particulier que le déposant connaît de vue pour être précepteur chez le sieur Colson, maître de pension, même rue, aurait paru et prenant le parti dudit écolier aurait sauté sur ledit archer qui avait frappé pour l’empêcher vraisemblablement de frapper de nouveau. » [IF]

Les exempts, archers et cavaliers de robe courte (compagnie d’officiers subalternes chargés en particulier d’exécuter les décrets de prise de corps) ont une très mauvaise réputation. Voici le récit d’une de leurs bavures. Le 21 août 1770, Nicolas Beauvais, marchand grainier dans l’ancienne Halle aux blés, est arrêté à tort à la place d’un autre poursuivi pour dettes. [IF]

La police a du mal à faire accepter son autorité aux grands seigneurs. En 1746, pendant le Carême, alors que la consommation et la vente de viande sont interdites, des inspecteurs découvrent une rôtisserie clandestine dans l’hôtel Matignon. La perquisition se passe mal. Les policiers ont pris la précaution de se munir de bâtons, pour se protéger « des insultes des domestiques et des soldats qui pouvaient s’y trouver, que même un des domestiques de ladite maison [les] avait menacés de coups de bâton". Le propriétaire les oblige à quitter les lieux :  « Ces seigneurs […] nous ont menacés de nous faire casser et nous ont dit […] de nous retirer ». [VD]

Le 4 mai 1772, une descente de police dans l’enclos du prieuré de Saint-Martin-des-Champs, lieu privilégié, à la réquisition des jurés luthiers, afin de saisir des violons entreposés dans la chambre d’un tailleur, dégénère en émeute : les habitants de l’enclos insultent et lancent des pierres, des tessons de bouteille et du plâtre sur les soldats de la garde de Paris, censés assurer la sécurité du commissaire et les jurés luthiers. Dans sa déclaration, Louis Pierre Regault, soldat de la garde de Paris, présent en habit bourgeois, détaille les exactions des habitants de l’enclos et rapporte les propos de l’un d’eux contre la garde : « Sacré nom de Dieu je n’ai pas pu tuer un de ces habillés de bleu ». Face à l’ampleur de la révolte, le commissaire et les jurés abandonnent la saisie des violons et sont exfiltrés par l’église. Dans les jours qui suivent, l’inspecteur Receveur et ses mouches arrêtent les principaux meneurs. Les habitants de l’enclos soupçonnent, à tort ou à raison, l’un des leurs, le compagnon tabletier, Alexandre Sébastien Guesnard, d’avoir renseigné l’inspecteur Receveur et obtiennent son incarcération par les religieux de Saint-Martin-des-Champs, juges seigneuriaux de l’enclos : « de laquelle prison, le déclarant n’est sorti que sur les menaces à lui faites par le père procureur (qui semble autoriser les rebelles) que, soit mouchard ou non, on le mettait en liberté qu’à condition qu’il ne rentrerait pas dans l’enclos, ou bien qu’il se ferait donner une volée de coups de bâton ». [IF]

Pratique ordinaire de la police, symbole de l’arbitraire administratif avant la Révolution, « l’enlèvement de police » est décrit plusieurs fois par Louis-Sébastien Mercier dans son Tableau de Paris : « Je marche tranquillement dans la rue ; un jeune homme assez bien mis me précède. Tout à coup quatre estafiers sautent sur lui, le tiennent à la gorge, l’entraînent, le pressent contre la muraille ; l’instinct naturel m’ordonne d’aller à son secours, un tranquille témoin, me dit froidement : "Laissez, ce n’est rien, Monsieur, c’est un enlèvement de police." On met les menottes au jeune homme, et il disparaît. » [VM]

Les émeutes 22 et 23 mai 1750, liées à la rumeur des « enlèvements d’enfants » constituent un événement unique par leur ampleur. Elles représentent le paroxysme d’un cycle d’une vingtaine d’émeutes commencé en 1749 et qui touche le cœur de Paris. Le « détonateur » de la crise est l’ordonnance du 12 novembre 1749 qui confie au lieutenant général de police Berryer une campagne d’arrestations des mendiants, vagabonds et sans aveu dans la capitale.
L’émeute du 23 mai, qui rassemble peut-être 10000 personnes, est la plus violente et la plus massive. L’étude du commissaire de La Vergée, rive droite, est assiégée par la foule qui veut saisir l’exempt de police Labbé, accusé d’avoir tenté d’enlever le matin du 23 mai un enfant de onze ans au pont Marie. L’homme est bientôt lynché. Au cours de son enquête, le Parlement interroge de nombreux témoins, dont Claude Toussaint, un commis de rang médiocre que sa livrée distingue et qui se pose en médiateur. Dans son arrêt du 1er août, le parlement condamne à mort trois émeutiers et ordonne pour l’avenir un contrôle plus strict des modalités d’arrestation. [VM]

Les émeutes de 1750

L'émeute de 1750

Source : Archives nationales

« […] il s’approcha et vit que la populace entourait la porte et la maison du commissaire La Vergée, les pierres volaient contre sa porte, et d’un petit cabaret à côté, le déposant apprit qu’il s’agissait d’un homme que la populace disait avoir pris un enfant entre les bras d’une femme auprès de la rue de l’Échelle, il apprit que cet homme était dans la maison du commissaire La Vergée, et le déposant entrevit des escouades de guet qui étaient à la porte dudit commissaire en dedans, mais qui étaient collés le mieux qu’ils pouvaient contre le mur pour éviter la grêle de pierres, que le déposant dans cette populace entendit un grand nombre de gens les plus près de la porte qui disaient : "Il faut avoir cet homme-là ou que le guet nous le rende" et que si le guet ne voulait pas le rendre, la populace y entrerait et hacherait ce guet en pièces. Le répondant convient que voyant la fureur de cette populace et le risque que courait le guet, il fut assez imprudent pour s’avancer ayant l’habit de la Grande Livrée sur le corps, et ayant ôté son chapeau au sergent, et lui dit : "M. le sergent, je viens d’entendre que si vous ne donnez pas satisfaction au public, ils vont vous forcer et vous hacher en pièces". Le sergent dit au répondant : "M., je vous remercie, je vous prie de dire à la populace que nous leur donnerons satisfaction", le [déposant fit la révérence au sergent et en s’en allant se trouvant entouré de beaucoup de monde il dit à la populace : "Messieurs, le sergent vient de me dire que vous alliez avoir satisfaction", et de là, le répondant s’en alla au magasin et n’a pas remis le pied dans la rue Saint- Honoré] »

Policer la police ?

Pour remédier à l’irrégularité du service comme aux accusations de corruption ou d’abus de pouvoir, les chefs de la police veillent de plus en plus à la qualité des recrutements et à la rémunération de leurs agents. Les contrôles s’exercent aussi tout au long des carrières et peuvent se traduire par diverses sanctions, incluant parfois la prison. A l’inverse, les officiers zélés reçoivent récompenses et gratifications. La police doit savoir se faire respecter, présenter une réputation sans tâche, éviter le scandale pour bénéficier d’une bonne reconnaissance sociale. (VM)

Dans les archives de Jean Baptiste Dorival, commissaire au Châtelet de Paris, on trouve le texte original d’un avis de recrutement publié dans le journal d’annonces, les Petites Affiches du 26 février 1780 : « Le commissaire Dorival désirerait avoir un clerc qui eût de bons répondants, de bons sentiments, qui fût de bonne famille, qui ne fût point de racaille et qui sût travailler ». Le commissaire Dorival définit ici ses exigences, légitimes, pour celui qui le supplée au quotidien, reçoit les plaignants en son absence, prépare, recopie et finalise les actes des procédures civiles, criminelles et de police. En creux, cette annonce révèle aussi la mauvaise renommée des clercs, dont témoigne aussi Louis Sébastien Mercier, dans son Tableau de Paris : en l’absence, fréquente, du commissaire, « c’est au clerc, personnage assez avili, que vous avez à faire ». [IF]

En 1736, François Vincent Liger, commandant des archers de l’Hôpital général, préposés à l’arrestation des mendiants et son brigadier Antoine Ferret « prévariquent journellement dans les fonctions de leur emploi et exercent des concussions et exactions considérables donnant des billets aux mendiants pour leur permettre de mendier librement au moyen des sommes d’argent qu’ils se font payer par eux ». À l’issue du procès tenu en la Chambre criminelle du Châtelet, Liger est condamné à être attaché au carcan trois jours consécutifs (en place de Grève, place Maubert et en face de l’hôpital de la Pitié), flétri sur l’épaule droite d’un fer chaud en forme des lettres GAL et à « servir le roi comme forçat en ses galères » pendant 9 ans. [IF]

Officier prometteur à ses débuts en 1768, l’inspecteur Troussey obtient la responsabilité du département des jeux. Mais lui-même joueur compulsif, il accumule rapidement des dettes impressionnantes, multiplie les escroqueries et les usages de faux. Dès les premiers soupçons en 1772, il fait l’objet d’une surveillance tatillonne et quotidienne qui dure plusieurs mois. Cette longue quête d’informations mobilise plusieurs officiers de police. La démission de l’inspecteur ne peut suffire en raison de la gravité des faits et du risque de scandale public. Sartine sollicite et obtient l’embastillement de Troussey en août 1773. [VM]

Cette lettre demande au secrétaire d’État de la Maison du roi un ordre d’enfermement contre Jean Jobert dit Bayonne, « observateur de police », souteneur et escroc. Les pratiques abusives et scandaleuses des auxiliaires qui « travaillent à la police » sont régulièrement sanctionnées par un internement administratif dans les prisons de Bicêtre ou par des peines d’exil. Les registres conservés en font foi. Mais Bayonne a toujours été rapidement libéré. Récidiviste endurci, il semble sûr de son impunité car il bénéficie de la protection des officiers de police qu’il sert. Elle lui est acquise tant qu’il « rapporte des affaires ». [VM]

La police divisée

Constituées sous l’Ancien Régime de corps hétérogènes – officiers de justice, anciens soldats recrutés comme policiers, militaires chargés de missions de police, auxiliaires divers- les forces de police n’ont pas toutes la même dignité, ni des privilèges semblables. Elles n’envisagent pas leurs rapports avec la population de la même manière. Traversée par des querelles corporatistes, écartelée entre fonctions de justice et de police, perturbée par les critiques de l’économie politique libérale et de l’opinion, la police en 17189 est loin d’être une puissance incontestable et monolithique. (VM)

Le mémoire du commissaire Mouricault interroge les modes de rémunération des policiers. Sous l’Ancien Régime, la police, à la différence de la justice, est gratuite. Les commissaires au Châtelet disposent d’une bourse commune alimentée par un prélèvement sur la rétribution des fonctions judiciaires. Il sert à financer les tâches de police. Ce système « mutualisé » est de plus en plus perturbé par le pouvoir de gratification du lieutenant général. Il accorde « à son choix » des missions particulières rémunérées ou le statut de commissaire « ancien ». Le lieutenant de police devient ainsi le maître des carrières et peut susciter les frustrations de ceux qui ne sont pas distingués. [VM]

Pour favoriser le développement d’une police proactive et administrative, plus autonome à l’égard de la justice, le trésor royal met à la disposition du lieutenant général de police des sommes qu’il utilise pour récompenser les officiers les plus zélés. Ce sont les commissaires et les inspecteurs qui exercent des spécialités et délaissent les fonctions judiciaires. Cette politique de gratifications induit une division entre « généralistes » et « spécialistes » aux carrières lucratives. Elle valorise un nouveau style de police contre les défenseurs d’une police traditionnelle. [VM]

Si certains commissaires au Châtelet de Paris travaillent avec les inspecteurs de police, nombreux sont ceux qui n’acceptent pas leurs méthodes expéditives et les mouches qui les accompagnent. Dans ce rapport adressé au lieutenant général de police, l’un des inspecteurs de police, chargé de la recherche des voleurs, fait valoir son point de vue sur les commissaires et leurs clercs : ceux-ci refusent de recevoir les plaintes des personnes volées et rechignent aux tâches de police peu lucratives. L’exemple du clerc du commissaire de La Vergée n’est mis en avant que pour montrer l’inefficacité des autres clercs et commissaires : « S’il y avait dans Paris 4 commissaires qui eussent chacun un clerc aussi au fait des voleurs que le sieur Paillard, ils seraient en état de recevoir toutes les plaintes et faire les informations. Je prie Monseigneur de ne me point citer vis-à-vis des commissaires parce que, à la réserve de 3 ou 4, je ne suis point leur ami ». [IF]

"Observations des officiers du Bureau de la Ville pour servir de réponse au mémoire présenté à la Cour par les officiers de police du Châtelet", [1770]

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Source : Archives nationales, K1015, n° 1761

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Après la tragique bousculade parisienne du 30 mai 1770, le Bureau de Ville, la Lieutenance de police et les officiers du Châtelet, le guet et la garde de Paris voient leur responsabilité engagée. En juin, le parlement diligente une enquête explosive. Il demande à tous ces acteurs de l’ordre public des mémoires justificatifs portant sur les faits et sur leurs prétentions en matière de police. Loin de faire preuve de la moindre solidarité, Ville et Châtelet s’opposent fortement sur les conceptions et les méthodes de la police, tout comme le guet et la garde. [VM]

La police au tribunal de l’opinion

Les appréciations des observateurs français et européens, parfois élogieuses, parfois critiques, témoignent de l’ambiguïté des regards posés sur la police parisienne depuis la fin du XVIIe siècle. « Meilleure police du monde » et modèle méritant qu’on s’en inspire pour les uns, elle suscite chez d’autres la méfiance, sinon le vif rejet de ses pratiques expéditives et arbitraires. Dans l’effervescence pré-révolutionnaire, elle symbolise de plus en plus le despotisme d’un autre âge. A la veille de 1789, la police apparaît comme un rempart obscurantiste faisant obstacle à la diffusion des Lumières.

Les événements importants, la vie de cour et la réputation des hommes politiques se mettent en chanson. Le chansonnier satirique de la Bibliothèque Historique de la Ville de Paris présente un texte qui se moque du lieutenant de police Lenoir en jouant sur son nom. Une version légèrement différente, tout aussi insolente, se trouve dans le Journal du libraire parisien Hardy (1729-1806). Elle a été glanée à l’été 1785 alors que Lenoir quitte sa charge. Le style et les références de cette chanson situent son auteur dans une sphère lettrée. [VM]

Alors que les tensions entre la monarchie et ses cours souveraines s’aiguisent, la police doit assumer un rôle répressif sur un terrain politique. Le 21 novembre 1787, l’arrestation de Fréteau, conseiller au parlement de Paris, par le commissaire Chénon, responsable du département de la Bastille, et l’inspecteur de police Quidor, met la ville en émoi. Pour contrer les rumeurs de brutalités policières, les lettres de Chénon, Quidor et Fréteau qui dédouanent la police, circulent dans le public. Chénon décrit précisément la scène tout en regrettant d’être obligé de se disculper « d’imputations calomnieuses ». [VM]

Plainte des sieurs et dame De La Palun au premier tribunal du département de Paris, séant au Palais, contre le sieur Calonne, ancien contrôleur général, contre le sieur le Noir, ancien lieutenant général de police […], [1791]

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Source : Archives nationales, Y 11441

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Le 17 novembre 1785, Pierre Chénon et l’inspecteur Quidor procèdent à l’arrestation et à la perquisition des papiers des époux Pigenat de la Palun, impliqués dans une escroquerie de deux millions de livres. Le procès-verbal d’arrestation est ordinaire ; les époux le signent. Mais fin 1791, leur avocat publie un long mémoire imprimé qui accuse la police de violences. Lenoir et son ami Calonne, contrôleur général des finances (1783­1787), « tous deux compagnons du crime, tous deux habiles artisans de perfidies et d’horreurs », sont incriminés pour leur cupidité ! [VM]

Quelques jours avant la prise de la Bastille, dans le jardin du Palais-Royal, un homme accusé d’être un espion de police est attaqué par des passants. « Mouchard » est une accusation courante au début de la Révolution : c’est l’espion de police, l’ami des princes et des aristocrates, l’ennemi de la Nation. Le mouchard présumé court le risque d’être rossé dans les lieux où se rassemblent les « patriotes », comme le jardin du Palais-Royal. L’homme attaqué ce jour-là était un petit délinquant d’origine suisse nommé Zezzi, qui vivait au château de Versailles, dénoncé par un bijoutier qui l’avait reconnu. L’événement devient un des symboles de l’agitation prérévolutionnaire à Paris. [VD]

En 1793, un homme politique, Pierre Manuel, publie un livre à charge contre la police de Paris d’avant 1789. Son ouvrage fait date car il s’appuie sur de très nombreux documents originaux, que Manuel a glanés dans les papiers des bureaux de la police. Lui-même élu municipal et responsable de la police après 1789 a bénéficié d’un accès privilégié aux archives de police, en principe secrètes. L’ouvrage est un succès commercial. Manuel dresse le portrait d’une police « despotique », inefficace et corrompue. L’homme politique règle aussi ses comptes, puisqu’il a été enfermé à la Bastille pour ses écrits dans les années 1780. [VD]

Jean-Baptiste Suard (1732-1817), homme de lettres proche du « parti des Philosophes », académicien, publie en 1789 un violent pamphlet contre Lenoir. Son titre mêle les accusations d’arbitraire et de corruption aux étapes de la carrière du magistrat. Lenoir est dénoncé pour avoir contribué avec Calonne, tous deux commissaires du roi, à réduire la fronde fiscale et judiciaire du parlement de Bretagne dans les années 1760. Devenu chef de la police, Lenoir est accusé d’avoir été constamment l’instrument du « despotisme ministériel ». Le procureur général La Chalotais est présenté comme l’une de ses victimes. [VM]

Considéré comme « quasi-ministre de Paris », proche du roi, le lieutenant général de police exerce une charge qui ouvre la voie à de hautes responsabilités ministérielles ou au sein du Conseil royal. Issu de la noblesse de robe, il se trouve au sommet de la hiérarchie politique et administrative. Une caricature anonyme de l’époque révolutionnaire rappelle que l’effondrement de la police du Châtelet et la réforme des institutions ont transformé ces personnages aux pouvoirs exorbitants en simples citoyens « actifs ». Ceux qui, selon Siéyès, ont (simplement) le droit d’élire les officiers de la Garde nationale constituée en 1789. [VM]