5. Ordonner la ville

Plan du chapitre

Avant d’être répressive, la police d’Ancien Régime se veut préventive. Au nom de la bonne administration, elle déploie un arsenal de mesures pour lutter contre les maux qui peuvent frapper la société urbaine. Les villes sont inflammables, insalubres, menacées par les épidémies, les incendies et les inondations. Leur désordre matériel fait l’objet d’un combat permanent pour limiter les encombrements de la voirie, la prolifération désordonnée des activités et des constructions, les effets de l’entassement humain. Très tôt la réglementation se préoccupe d’endiguer ces désordres. Mais alors que les villes se développent, les polices urbaines manifestent des capacités d’innovation inédites. Au Siècle des Lumières, elles s’engagent clairement dans des politiques « d’amélioration » que l’on veut « utiles » au public. Face aux risques quotidiens, les responsables policiers concentrent leurs efforts sur l’incendie, les accidents de la circulation, les secours aux noyés, la sécurisation de l’espace grâce à l’éclairage public, le développement d’une politique sanitaire, la rationalisation de l’assistance aux plus démunis. (VM)

Les périls de la ville

« Toutes les Loix de la Police n’ont pour objet que le bien commun de la Société », proclame le commissaire Delamare dans son Traité de la police (1705). Cette prétention trouve sa meilleure justification dans les efforts de la police des Lumières pour rendre l’espace urbain plus habitable et moins périlleux. À côté de risques toujours présents, comme le feu et les inondations, de nouveaux dangers apparaissent : les carrosses se multiplient, la pollution industrielle augmente.
Les villes du XVIIIe siècle se caractérisent par leur vulnérabilité aux catastrophes. Dans des espaces réduits se concentrent des populations denses et les activités les plus diverses, jusqu’aux plus dangereuses et aux plus polluantes, dans des constructions et des sites exposés aux accidents. Au siècle des Lumières, la police invente des dispositifs originaux pour prévenir les périls ordinaires de la ville : l’incendie, l’inondation, l’insalubrité.
« Rien n’est tant à craindre que le feu », affirme le Dictionnaire ou Traité de la police générale en 1771. À Paris, si les pompiers sont appelés pour une centaine de débuts d’incendie vers 1720, ce chiffre atteint environ 500 à la fin du siècle. Il s’agit surtout de feux de cheminée, produits par la combustion de la suie dans des tuyaux mal ramonés, mais, dans une ville où les maisons en bois sont très nombreuses (autour des Halles, par exemple), le risque est considérable. Une chandelle renversée, un brandon échappé de l’âtre peuvent mettre le feu à une robe ou à un matelas de paille. (DG)

Un danger urbain majeur : l’incendie

La veille de la Saint-Jean-Baptiste, le 23 juin, est la grande fête estivale, marquée par des feux de joie. On tire aussi des fusées et d’autres artifices, ainsi que des armes à feu, qui font beaucoup de bruit et ajoutent des éclairs de lumière. À cause du risque d’incendie, les règlements parisiens défendent de jeter des pétards dans les rues, et la vente des fusées et de la poudre à canon est interdite depuis 1667.
Malgré ces interdits renouvelés chaque année, ces pratiques se poursuivent. [DG]

La foire Saint-Germain, construite à la fin du XVIe siècle, contient quelque 140 loges, disposées dans un carré formé par cinq grandes allées, coupées par six rues secondaires. Chaque loge est construite en bois, boutique en bas et une chambre au-dessus. La nuit du 16 au 17 mars 1762, le feu prend, sans doute dans le théâtre de Nicolet. Le vent souffle fort et malgré les efforts des sauveteurs, toute la foire est détruite, mais ils empêchent la destruction des maisons du quartier. La foire est très fréquentée, y compris par l’élite sociale, aussi l’incendie frappe beaucoup l’imagination des Parisiens. [DG]

Les pompes à feu, déjà répandues dans les villes allemandes et hollandaises, sont introduites à Paris en 1699. Un corps de 32 « pompiers » est créé en 1716, leur nombre augmentant progressivement à 221, en 1785. Un « directeur des pompes », nommé et payé par le roi, est tenu de maintenir les pompes et d’entraîner les pompiers. Suite aux incendies de la foire Saint-Germain en 1762 et de l’Opéra en 1763, le lieutenant général de police de Sartine entreprend une réforme importante. Le service devient permanent, et des corps de garde sont établis dans toute la ville, avec des moyens beaucoup plus importants. [DG]

Les premiers pompiers n’ont aucune protection, mais très tôt on ressent le besoin de marques distinctives pour les faire reconnaître dans la confusion d’un incendie. À Paris, dès 1722 ils ont un uniforme et un bonnet particulier. Le besoin de protection relève de l’expérience de combattre les incendies, ainsi des casquettes sont introduites vers les années 1750, des vestes et visières de cuir en 1793. Ces équipements de protection ne deviennent généraux qu’au XIXe siècle. [DG]

Les outils de base des combattants du feu, outre les pompes, sont les seaux en cuir, les haches, les échelles, et les fers de gaffe. Les pompiers dirigent les pompes et s’occupent du sauvetage des personnes, mais jusqu’au milieu du XIXe siècle ils dépendent de l’aide des populations. Dans presque toutes les villes, les ouvriers du bâtiment sont obligés à se présenter aux incendies, car ils savent découvrir les toits et utiliser les haches et les fers de gaffe pour démolir les murs. En dernier ressort, ils abattent des maisons pour créer un coupe-feu. [DG]

Le corps de pompiers d’Amsterdam, aux XVIIe et XVIIIe siècles, est l’un des mieux organisés en Europe. La ville, qui compte environ 200 000 habitants, est divisée en 65 districts, chacun ayant sa pompe et ses pompiers. Ceux-ci sont des conscrits, tirés principalement de la marine marchande, des métiers de la construction, et des transports.
D’autres villes aux Pays-Bas adoptent le même système. Les pompiers n’ont pas d’uniforme, mais chacun porte une médaille permettant de l’identifier, qui porte d’un côté les armoiries de la ville et le numéro du quartier, de l’autre une pompe. [DG]

Inondations, crues, glaces

"Journal des événements arrivés sur la rivière [...] depuis l’instant de la débâcle des glaces et des précautions prises pour prévenir et empêcher les malheurs", par le Bureau de la Ville de Paris, 13 janvier 1768

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Source : Archives nationales, K1022 n° 160

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"Journal des événements arrivés sur la rivière [...] depuis l’instant de la débâcle des glaces et des précautions prises pour prévenir et empêcher les malheurs", par le Bureau de la Ville de Paris, 13 janvier 1768

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"Journal des événements arrivés sur la rivière [...] depuis l’instant de la débâcle des glaces et des précautions prises pour prévenir et empêcher les malheurs", par le Bureau de la Ville de Paris, 13 janvier 1768

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Source : Archives nationales, K1022 n° 160

"Journal des événements arrivés sur la rivière [...] depuis l’instant de la débâcle des glaces et des précautions prises pour prévenir et empêcher les malheurs", par le Bureau de la Ville de Paris, 13 janvier 1768

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Source : Archives nationales, K1022 n° 160

"Journal des événements arrivés sur la rivière [...] depuis l’instant de la débâcle des glaces et des précautions prises pour prévenir et empêcher les malheurs", par le Bureau de la Ville de Paris, 13 janvier 1768

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Source : Archives nationales, K1022 n° 160

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Source : Archives nationales, K1022 n° 160

Tenu par le Bureau de la Ville, responsable des ports et de la navigation, ce journal témoigne des dommages provoqués par la fonte des glaces ou débâcle dans Paris même. À l’époque, la Seine est un axe vital pour Paris et abrite de nombreuses activités. Les ponts, les quais, les bateaux mais aussi les nombreuses installations le long du fleuve, comme les moulins, sont vulnérables. [VD]

L’évacuation des boues des rues

La propreté des rues fait partie des attributions des commissaires au Châtelet de Paris, chargés d’inspecter les rues pour la faire respecter. Pour l’audience de la Chambre de police du vendredi 7 décembre 1736, le commissaire Trudon a dressé un rôle des contraventions observées la veille lors de sa tournée dans les rues des quartiers du Marais et de Sainte-Avoie. Les propriétaires et marchands sont assignés à comparaître et condamnés à des amendes : 3 livres pour ne pas avoir balayé devant les portes de leurs maisons et boutiques ; 5 livres en cas de présence d’un tas de pierres « embarrassant la voie publique », de matières fécales, de tas de fumier, ou pour avoir jeté un seau d’eau ou une potée d’urine par la fenêtre ! [IF]

Le balayage des rues est une vieille préoccupation de la police : déchets des artisans, « boues » et eaux usées, déjections des animaux, s’accumulent chaque jour. La police oblige les propriétaires des maisons à balayer devant chez eux. Le système se professionnalise : les particuliers peuvent s’abonner auprès de balayeurs à plein temps, agréés par la police. En cas de défaut de propreté, ce sont les nettoyeurs qui seront sanctionnés par une amende. L’abonnement fait partie des « améliorations » portées par la police dans les années 1770. [VD]

À l’instar des ordonnances de police réitérées chaque année, les sentences de certaines audiences de la Chambre de police sont imprimées et affichées dans les rues de Paris afin de frapper les esprits et éduquer les Parisiens. Afin de faire respecter les règles de salubrité publique imposées aux marchands bouchers (construction de puisards, transport quotidien du sang hors de la ville, nettoyage des abattis), rien de mieux qu’un exemple : Thomas Le Lièvre, marchand boucher de la rue Mouffetard, dont la cour a été trouvée jonchée « d’excréments et immondices qui causaient une grande puanteur » et gardée par six chiens « monstrueux pour la grosseur », est condamné le 16 septembre 1724 à 20 livres d’amende et à se défaire de ses chiens ! [IF]

Organiser l'espace

Circulez !

Favoriser le commerce et assurer une circulation urbaine fluide sont deux enjeux quelquefois contradictoires que la police doit concilier dans les villes du XVIIIe siècle. Par ordonnance du 12 mai 1724, le lieutenant général de police « accorde à la veuve Lelièvre une place sur le carreau de la grande Halle près la fontaine pour y serrer les paniers qui servent d’ordinaire aux boulangers les jours de marché » et mandate le commissaire Duplessis pour « lui marquer précisément l’endroit qu’elle pourra occuper et fermer avec des planches afin qu’elle n’anticipe point sur la voie publique et qu’elle ne prenne justement que ce qui nous paraîtra utile ». Sur place, aidé d’un menuisier, le commissaire délimite et mesure le terrain où la veuve Lelièvre fera édifier une loge, lui enjoignant, si elle est obligée d’adosser ses planches sur la fontaine du Pilori, d’en informer et obtenir permission auprès du Bureau de la Ville, compétent pour les ports et bateaux, mais aussi les fontaines ! [IF]

Afin de faciliter la circulation dans les rues de Paris et éviter les accidents, le lieutenant général de police Lenoir souhaite réduire drastiquement le nombre des échoppes adossées aux maisons et hôtels particuliers. Les commissaires sont chargés de dresser des états en indiquant le type de commerce, l’ancienneté de l’échoppe et de l’autorisation accordée par les propriétaires des maisons ainsi que leur avis sur la nuisance occasionnée pour la circulation. Le commissaire Joron accompagne son état pour le quartier Saint-Antoine d’un courrier au lieutenant général de police Lenoir. Il y plaide le maintien intégral des échoppes de son quartier, en raison de la pauvreté du peuple : « 32 échoppes, quartier Saint-Antoine. Aucune ne nuit à la voie publique […] J’ai mandé chez moi tous les gens qui occupent celles de mon quartier. L’un a huit enfants, un autre en a plus ou moins, et ils m’ont observé que si on les privait de leurs échoppes, ils allaient se trouver sans ressources. Il faut, disent-ils, payer les droits au roi, Comment payerons-nous si nous ne pouvons plus travailler, il faut que nous demandions l’aumône et l’on nous arrêtera. Voilà ce que disent ces malheureux. Vous savez, Monsieur, que depuis plusieurs années, tout le comestible est devenu d’une cherté incroyable, le peuple est vraiment à plaindre quant à sa subsistance ». [IF]

Le nombre croissant de voitures dans Paris au XVIIIe siècle ne cesse d’inquiéter les autorités. Ce problème se retrouve logiquement dans le grand projet de réformation de la police que propose au roi Jean-François Guillauté, un officier de maréchaussée parisien, en 1749. Guillauté perfectionne les plaques d’immatriculation existantes, apparues dans les années 1720, pour qu’elles soient plus visibles sur les voitures et sur les colliers des animaux. Le dispositif a des fins fiscales, mais sert aussi à retrouver les propriétaires des véhicules, à l’origine de graves accidents dans les rues encombrées de Paris, alors étroites et sans trottoirs. [VD]

Cet inventaire des porteurs de chaises et de leurs emplacements illustre le travail d’enregistrement des professions de service non-corporées auquel se livre régulièrement la police de Paris. Dans ses Mémoires, Lenoir le présente comme une mesure d’ordre et de discipline : « Quelques-uns d’entre eux qui n’avaient pas de métiers avaient été classifiés. Tels étaient les forts de la Halle, les cochers de place etc… etc… Ils étaient par-là plus immédiatement sous l’inspection de la police ; ils étaient enregistrés par la police […] qui leur assignait des places ». [VM]

Afin d’attirer les Parisiens sur la promenade des Champs Élysées, la foire Saint-Ovide, auparavant située place Vendôme, est transférée en 1771 à la place Louis XV [place de la Concorde]. Ainsi que nous l’indiquent les « Observations sur le service de la garde » de 1775, la police de la foire, qui se tient de la mi-août à la mi-septembre, consiste essentiellement à fluidifier la circulation et ainsi développer le commerce : « Les factionnaires posés aux différents postes devraient principalement faire marcher les voitures en sorte qu’elles n’incommodent point les marchands et ne masquent point leurs boutiques ». Le plan réalisé par Moreau, architecte de la Ville en 1776 prévoit une organisation très géométrique et aérée de la foire : au centre des différentes voies de circulation qui seront pavées, le corps de garde peut surveiller la circulation et les 150 boutiques (bijoutiers, merciers, marchands de pain d’épice, cafés et spectacles) ; à l’arrière, des gazons entourés de barrières. À la suite d’un incendie en 1776, la foire disparaît en 1777. [IF]

Éclairer la ville

La monarchie s’empare du problème de l’éclairage urbain dans la seconde moitié du XVIIe siècle, explicitement pour des motifs de sécurité. À Paris, l’établissement d’un système public d’éclairage est confié au premier lieutenant de police La Reynie et rattaché à la police de la voirie. On adopte un modèle de lanternes suspendues et alimentées à la bougie de suif, le financement étant assuré par la levée de taxes sur les propriétaires. Le dispositif est étendu aux plus grandes villes du royaume par un édit de 1697. Les espaces de l’Ouest parisien en voie d’urbanisation qui attirent la noblesse, sont rapidement équipés. Le Cours-la-Reine, ouvert au début du XVIIe siècle est devenu un siècle plus tard une promenade à la mode le long de la Seine, au départ des Tuileries et vers la colline de Chaillot. Elle est replantée d’arbres par le duc d’Antin en 1724 et dotée d’un éclairage public. [VM]

Le commissaire Doublon, ancien du quartier Saint-Benoît, doit veiller au bon fonctionnement de l’éclairage public. Dans les quartiers, celui-ci mêle formes de police bourgeoise et contrôle du Châtelet. Le financement est assuré par les notables qui doivent élire, sous la supervision de la police, les commis à l’allumage des lanternes. La police supervise la régularité du travail des allumeurs ; elle fixe les horaires ; elle réprime les bris de lanternes et s’assure de leur entretien régulier. Ce système disparaît dans les années 1770-1780 avec la mise en régie de l’éclairage public provoqué par le passage aux réverbères, plus coûteux et qui ont des exigences techniques plus lourdes. La tutelle policière ne s’exerce plus qu’à travers le contrôle du respect des obligations contractées par les entrepreneurs et dans la définition des règles de fonctionnement. [VM]

Rendre la ville lisible

En 1730, le lieutenant de police Hérault fait inscrire le nom de chaque rue sur une plaque indicatrice. La mesure permet aux voyageurs de se repérer pour ceux qui savent lire. L’indication du quartier par un numéro rend concret le découpage de la ville opéré par la police depuis 1702. Il facilite la délimitation des tâches des différents services urbains. Les plaques doivent être réalisées aux frais des propriétaires, selon un modèle uniforme. Ils devaient aussi les remplacer si elles étaient abîmées. [VD]

Selon les préconisations du lieutenant de police, chaque plaque porte le nom de la rue et le numéro de l’un de 20 quartiers de police auquel elle appartient. [VD]

La police « amélioratrice »

De nouvelles protections

Recueillir les enfants trouvés

Les abandons de nouveau-nés sont courants à Paris. Le commissaire tient registre des enfants trouvés dans son quartier avant qu’ils soient confiés à des institutions. Il conserve aussi avec soin les billets que laissent les parents sur le nouveau-né. Griffonné à la hâte, il contient les ultimes recommandations pour ceux qui trouveront l’enfant et en prendront soin. Beaucoup espèrent pouvoir récupérer leur enfant plus tard, dans un abandon qui est présenté comme une solution temporaire. [VD]

Le secours aux noyés

Le Bureau de la Ville, qui a juridiction sur toutes les affaires localisées sur la rivière et les personnes y travaillant, tient un état des personnes noyées et finance leur sauvetage. [IF]

Les techniques de fumigation pour secourir les noyés ont stimulé l’ingéniosité médicale des inventeurs. À partir des années 1760, les représentants de l’État royal et les municipalités s’engagent fortement pour diffuser de nouvelles méthodes de « secours aux noyés ». Textes réglementaires et brochures fournissent le détail des soins à dispenser : placer l’accidenté près d’un feu, l’envelopper de couvertures ou le mettre dans un lit de cendres chaudes, lui insuffler de la fumée de tabac par les orifices du corps, au moyen d’une « seringue fumigatoire ». En dernier recours, on peut appeler un chirurgien pour faire une saignée ou ouvrir la trachée. [VM]

Les miasmes des cimetières

En 1763, les commissaires enquêtent sur l’état des cimetières paroissiaux dans Paris. Les autorités s’inquiètent de leur encombrement et des risques encourus par les habitants aux alentours. Celui de la paroisse Saint-Paul justifie ces craintes : « les voisins ont déclaré que lorsqu’il tonne, qu’il pleut, on est incommodé par les exhalaisons du cimetière ». La police craint les miasmes, qui seraient toxiques, nés de l’interaction entre le sol, les corps et les éléments (eau, air). L’enquête de 1763 dresse un tableau alarmant des cimetières parisiens qui pousse la police à vouloir imposer leur fermeture au nom de la salubrité publique. En vain, cependant, car les habitants veulent garder leurs morts près d’eux. [VD]

Le savant Cadet de Vaux, consulté par le lieutenant général de police, a eu un rôle décisif dans la fermeture du cimetière des Innocents, en 1780. Dans les caves voisines, les chandelles s’éteignent et certains habitants suffoquent. Lenoir fait appel à l’expertise de Cadet de Vaux et de la Faculté. Avec ses instruments, le chimiste mesure les qualités de l’air. L’insalubrité est telle que les caves doivent être murées et le cimetière clos. Son rapport détermine le Parlement de Paris à agir et fermer définitivement le cimetière quelques semaines plus tard. Un droit nouveau émerge : celui de pouvoir respirer un air pur. [VD]

De nouvelles institutions : le Mont de Piété et le Bureau des Nourrices

Avec le soutien du ministre des finances Necker et du lieutenant général de police Lenoir, la création du Mont-de-Piété à Paris en 1777 vise à moraliser le crédit et à lutter contre l’usure. Placé sous le contrôle du Parlement et de la Lieutenance générale de police, le Mont-de-Piété a le monopole du prêt sur gage. Le succès est rapide car nombre de salariés vivent à crédit pour payer un loyer, se nourrir, régler des frais médicaux, parfois pour travailler en achetant de la marchandise ou des outils. L’action de la police permet de rendre les pauvres « utiles à l’État » en favorisant leur accession au travail et à la consommation. [VM]

Audience de police du vendredi 19 mars 1756 par le commissaire Grimperel pour dettes envers les nourrices

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Source : Archives nationales, Y//9510

Audience de police du vendredi 19 mars 1756 par le commissaire Grimperel pour dettes envers les nourrices

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Audience de police du vendredi 19 mars 1756 par le commissaire Grimperel pour dettes envers les nourrices

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Au XVIIIe siècle en France, la mise en nourrice se généralise à toutes les couches de la société urbaine. En 1769, la création du « Bureau des recommandaresses » parisien par le lieutenant général de police Sartine instaure une régulation de l’industrie nourricière. La réforme place sous le contrôle de la police le recrutement des nourrices. Elle oblige à une surveillance médicale pour limiter la diffusion du mal vénérien. Enfin, la police veille à la régularité du paiement des mois de nourrice et poursuit les parents mauvais payeurs qui sont jugés devant la Chambre de police. [VM]

L’Hôpital de Vaugirard : la lutte contre les maladies vénériennes

Les circulaires du lieutenant de police adressées aux syndics de la compagnie des commissaires sont parfois de rudes admonestations contre la mauvaise application de ses directives. Dans tous les domaines et cette fois dans celui de la santé publique, les commissaires doivent seconder ses vues. Dès le début de sa seconde magistrature en 1776, Lenoir entend améliorer la prise en charge du mal vénérien, en soutenant la recherche médicale et en multipliant les institutions publiques spécialisées, comme l’hospice de Vaugirard chargé du traitement des enfants et des nourrices atteintes de ce mal. [VM]

En 1780, Lenoir fait imprimer une brochure, Détail sur quelques établissemens de la Ville de Paris [...] Elle constitue la suite du Mémoire sur la police de Paris demandé quinze ans plus tôt à Versailles par la cour de Vienne, resté manuscrit et confidentiel. Cet opuscule décrit des établissements, des services placés sous la tutelle de la police, les mesures sociales ou sanitaires adoptées entre la magistrature de Sartine et celles de Lenoir. Le texte consacre « la religion de l’utile » et le « service au public » comme principales justifications de la police. [VM]